Lorsque Adrian Lyne s’est mis en tête de réadapter „La femme infidèle“ de Claude Chabrol, certains grincements de dents se firent entendre. Quoi? Un Chabrol à la sauce hollywoodienne, par un réalisateur friand des relations triangulaires et moralisateur avec ça!

Oui, Constance adore ces moments passés avec son „french lover“.
CINE-LYNE
L’infidèle remake
Pour „Unfaithful“, il fallait d’emblée oublier la vision du réalisateur français, unique en son genre, et se concentrer sans à priori sur celle de Lyne. (On se souvient de „Fatal attraction“ avec la très, très méchante et instable maîtresse, qui ennuie le gentil père de famille pour un petit écart de conduite.)
Tout d’abord, changement de décor, puisque l’action se déroule dans la banlieue de New York où vivent Constance (Diane Lane), son adorable mari (Richard Gere) et leur jeune garçon. Un jour exagérément venteux, alors que Constance déborde d’activité dans les rues de New York, à la recherche d’un cadeau pour l’anniversaire de son fils, la jolie femme est littéralement soufflée, pour se fracasser dans les bras d’un beau jeune homme (Olivier Martinez). Tout est donc de la faute du vent!
Il s’avère par la suite que ce jeune inconnu possède un sex-appeal hors du commun, qu’il se nomme Paul Martel, bouquiniste à ses heures et français jusqu’au bout des poils, qu’il a en nombre.
Il invite la belle inconnue à soigner le bobo fait au genou et lui offre un des livres de sa collection, tout en la regardant en coin avec un petit sourire irrésistible. Il n’en faut pas plus pour troubler cette femme d’âge mûr, dont la vie trop confortable lui a valu d’oublier le goût des choses pimentées.
Constance, de retour dans sa jolie maison, est plus bouleversée qu’il n’y paraît. Au point de ne pas résister à l’appel d’une nouvelle journée de shopping dans les rues de New York, avec le numéro de téléphone de Paul en poche. Des fois que le vent se lèverait à nouveau. Après moult hésitations, elle craque et ne résiste plus aux assauts du conquérant „french lover“.
Gere mal à l’aise
Jusque-là, le spectateur est le témoin d’une histoire triangulaire classique – deux hommes, une femme – et des problèmes qui commencent à en découler. Adrian Lyne base son film sur les sombres contradictions de la nature humaine et principalement sur le sentiment de culpabilité. Oui, Constance adore ces moments passés avec son amant. Non, elle n’arrive pas à assumer ensuite la trahison faite à sa famille et se partage entre plaisirs interdits et culpabilité. On peut reconnaître à Diane Lane le talent d’avoir su jouer dans une même scène, le désir, la gêne, la joie, l’excitation, le désarroi, la culpabilité, autant de nuances indissociables de l’acte adultère, selon Adrian Lyne.
La première partie du film, toute dédiée aux troubles de Constance, est certainement la plus intéressante. La suite se mélodramatise maladroitement, avec un Richard Gere visiblement mal à l’aise dans ce rôle à émotion forte. Moins doué pour le trouble que Diane Lane, plutôt lac tranquille qu’océan déchaîné, son jeu n’assume pas l’intensité demandée pour ce rôle. Quant à Olivier Martinez, il est très crédible en „french lover“ craquant, mais c’est manifestement la seule chose qu’Adrian Lyne lui demandait d’être. Cela se regarde sans déplaisir, à condition de ne pas chercher à comparer ce film avec l’original français, avec qui il n’a que très peu de choses en commun.
Séverine Rossewy