Dans une de ses questions parlementaires volontairement vagues et incendiaires dont il a le secret, le député populiste de droite s’inquiétait – encore une fois – de la censure apparente des opinions de droite.

(©la chariotte à roulette / flickr)
Fernand Kartheiser entend des voix. Pas des voix dans sa tête, mais « partout en Occident, [où] de plus en plus de voix s’élèvent qui disent que les médias censurent les opinions conservatrices ». Après cette lancée il s’en prend au média dominant RTL, qui devrait selon lui s’efforcer « d’informer le plus objectivement possible et de refléter toutes les opinions ». Finalement, il en vient au cœur de son argument, une dame (peut-être même sa compagne Sylvie Mischel, qui vient d’ailleurs de se faire réélire présidente des ADR-Fraen et donc de réintégrer le comité directeur du parti, qu’elle avait dû quitter après une affaire autour d’un post Facebook) qui s’est vu refuser la publication d’un commentaire sur le site de RTL – les responsables arguant qu’à cause de ses arguments homophobes et notamment contre l’adoption d’enfants par des couples homosexuels, elle se trouvait sur une « blacklist ». Ce qui est évidemment inacceptable pour Fernand Kartheiser, dont on connaît la croisade contre les droits des homosexuels et l’argumentaire ultracatholique tout droit tiré de la « Manif pour tous ».
Il a donc voulu savoir de Xavier Bettel en tant que ministre des Médias s’il estimait que RTL « en tant que média dominant » ne devrait pas refléter toutes les opinions, si des conventions existent entre l’État et RTL dans ce contexte, s’il pensait que les médias subventionnés ne devraient pas aussi publier des convictions qui ne répondent pas aux critères du « mainstream de gauche » et beaucoup d’autres détails, comme une liste des « cartes blanches » sur les radios. Finalement, il demande si le gouvernement envisage de commanditer une étude qui déterminerait si la presse a été objective en 2015 avant le référendum, surtout sur le droit de vote des étrangers et étrangères. Bref, des questions tout droit sorties de la sphère paranoïaque dans laquelle se prélassent les populistes de droite de Bolsonaro à Le Pen en passant par l’AfD.
Le « mainstream de gauche » qui censure les braves conservateurs et conservatrices…
Dans sa réponse, le ministre assure qu’il n’entend pas les mêmes voix et qu’il ne commentera pas des insinuations aussi vagues que celles faites par le député Kartheiser. De même pour le commentaire refusé à une certaine dame sur le site de RTL. Il rappelle juste dans ce contexte que la presse luxembourgeoise est soumise à un code de déontologie émis par le Conseil de presse. Bettel aurait aussi pu se référer à la « netiquette » proposée par Beesecure à laquelle toutes les rédactions du pays ont souscrit, comme au fait que certaines opinions racistes ou incitant à la haine sont criminalisées au grand-duché.
Un peu curieuse aussi sa phrase qui dit que RTL « n’est pas un média subventionné par ou conventionné avec l’État ». Certes, RTL ne profite pas de l’aide à la presse écrite, mais les sommes que la maison Bertelsmann reçoit dans le cadre des contrats de concession ne sont pas minimes – tout au contraire. Ne pas les mentionner n’est pas très intellectuellement honnête. Mais soit, du moins dans le reste de la réponse, le ministre assure plus d’une fois respecter l’indépendance éditoriale de la presse et surtout ne pas vraiment comprendre où Kartheiser voulait en venir avec ses suspicions de censure. Une censure qui de toute façon n’existe que dans sa tête.