Le Tribunal de l’Union européenne se prononce en faveur de la recherche embryonnaire

Photo : Cour de justice de l’Union européenne

En confirmant la décision de la Commission de ne pas soumettre de proposition législative dans le cadre de l’initiative citoyenne européenne (ICE) « Un de nous », le Tribunal de l’Union européenne a certes conforté celles et ceux qui voyaient dans cette initiative une sorte de sous-marin de fondamentalistes chrétiens contre la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Mais le principal argument utilisé par le tribunal risque de ne pas être du goût de celles et ceux qui croient en l’ICE comme instrument de démocratie de base.

Introduite par le traité de Lisbonne de 2007, l’ICE a dû attendre cinq ans avant que ses règlements spécifiques soient mis en place. En 2012, « Un de nous » avait présenté son initiative, qui visait à interdire et à mettre fin « au financement, par l’Union, des activités qui impliquent la destruction d’embryons humains (en particulier dans les domaines de la recherche, de l’aide au développement et de la santé publique), y compris le financement direct ou indirect de l’avortement ». Dans la foulée, l’initiative avait réuni 1,7 million de signatures (1 million auraient suffi). Le 28 mai 2014, le dernier jour de son mandat, la Commission avait refusé de donner suite à l’initiative et avait indiqué ne pas « proposer au législateur de l’Union d’adopter un acte juridique aux fins de l’application des traités ».

Insatisfaits de la communication de la Commission, les auteur-e-s de l’initiative avaient alors demandé l’annulation de cette décision devant le Tribunal de l’Union européenne. Dans son arrêt du 23 avril 2018, le tribunal rappelle que les traités « ont conféré à la Commission un quasi-monopole en matière d’initiative législative ». Selon lui, l’exercice du droit d’initiative citoyenne européenne ne saurait contraindre la Commission à soumettre une proposition d’acte juridique. Le tribunal affirme ainsi qu’une « interprétation contraire reviendrait à ôter tout pouvoir d’appréciation de la Commission dans l’exercice de son pouvoir d’initiative législative suite à une initiative citoyenne européenne ».

Pris isolément, cet argument pourrait signifier la fin même de l’ICE, dont le but est justement d’amener la Commission à rédiger de nouvelles propositions d’actes juridiques de l’Union dans les domaines relevant de ses attributions. Ceux qui ont critiqué l’ICE parce qu’elle n’est pas contraignante pour la Commission se voient donc donner raison.

Mais le simple refus ne suffit pas, et le tribunal a aussi analysé les arguments de la Commission en jugeant qu’elle « a suffisamment motivé sa décision et n’a pas commis d’erreur manifeste dans son appréciation de la situation juridique ».

Dans son argumentaire d’une trentaine de pages, la Commission avait observé que, les dépenses de l’Union devant être conformes aux traités de l’Union et à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, le droit de l’Union « garantit que toutes les dépenses de l’Union, y compris celles engagées dans les domaines de la recherche, de la coopération au développement et de la santé publique, respectent la dignité humaine, le droit à la vie et le droit à l’intégrité de la personne ».

Par ailleurs, la législation actuelle de l’Union répondrait déjà à plusieurs demandes importantes des auteur-e-s de l’initiative, notamment à celle visant à obtenir que l’Union ne finance pas la destruction d’embryons humains et qu’elle instaure des contrôles adaptés. La Commission constate également que le soutien apporté au secteur de la santé des pays en développement « contribue fortement à réduire le nombre d’avortements via l’accès à des services sûrs et efficaces et qu’une interdiction de financement de l’avortement pratiqué dans les pays en développement entraverait la capacité de l’Union à atteindre les objectifs fixés en matière de coopération au développement, notamment celui afférent à la santé maternelle ».


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