KOSOVO 1999: Un triomphe fatal

Dix ans plus tard, il apparaît clairement que les objectifs de l’attaque contre la Yougoslavie ont été atteints. Pourtant, la paix dans le monde ne s’en porte pas mieux.

Le 24 mars 1999, suite à un ultimatum, des avions de l’OTAN commençaient à bombarder le territoire de la République fédérale de Yougoslavie. Une alliance militaire née de la guerre froide essayait ainsi d’imposer sa solution au conflit du Kosovo, en se dispensant du mandat de l’ONU – en principe indispensable avant tout emploi de la force.

Pourtant, cette année-là, le monde commémorait aussi le dixième anniversaire de la chute du mur. Cette décennie post-guerre froide avait suscité l’espoir que le monde convergerait enfin vers une société globale, gouvernée par des valeurs communes et réglant ses différends sans recours aux armes. Pour certains, des interventions « humanitaires » armées comme celle au Kosovo représentaient même un passage obligé vers un ordre nouveau.

Après 78 jours de bombardement des militaires et des civils yougoslaves, le leader serbe Slobodan Milosevic signa un accord qui représentait un triomphe complet pour l’OTAN. A l’époque, cela était moins évident. Certes, l’occupation du territoire kosovar par les puissances occidentales signifiait la fin des persécutions – du moins de celles endurées par les citoyens albanais, car les autres groupes ethniques se retrouvèrent victimes à leur tour. Mais ce n’est qu’aujourd’hui, dix ans plus tard, que les conséquences apparaissent clairement : l’accord d’alors ouvrait la voie à l’indépendance du Kosovo et cette guerre confirmait l’OTAN dans son rôle de « police mondiale ».

Mais la victoire écrasante de l’alliance militaire anti-soviétique à la recherche d’une nouvelle mission inaugurait aussi le triomphe de la realpolitik et de la loi du plus fort. Contrairement aux espoirs d’une plus grande justice entre les pays, on assista à un traitement selon la tête du client. En matière de prolifération nucléaire par exemple, l’Irak a été envahi et l’Iran mis au ban de la communauté internationale, tandis que les programmes nucléaires d’Israël ou de l’Inde sont tolérés voire parrainés.

Ainsi, la guerre du Kosovo représente le début de la fin des illusions des années 90. La « société globale » gouvernant les affaires du monde se réduit aux Occidentaux, plus quelques pays émergents, comme le montrent l’écrasement des Géorgiens et des Tibétains. Et la méthode de gouvernement celle de la force, l’ONU se laissant instrumentaliser afin de donner un vernis de légitimité à cette situation.

Depuis 1999, on a donc mis à terre les méchants – Slobodan Milosevic ou Saddam Hussein – mais surtout les idéalistes. En effet, confronté aux bombardements « pour la bonne cause » de ce 24 mars, le mouvement pacifiste et l’ensemble des forces progressistes s’est divisé. Nombreux restent aujourd’hui celles et ceux qui acquiescent à la domination occidentale et à la logique de la force et espérent les mettre au service des droits humains et de la paix. En face, celles et ceux qui ont désapprouvé les bombardements de 1999 considèrent que la situation actuelle au Kosovo et les instabilités mondiales confirment leur analyse et se retranchent dans une logique de front du refus.

Cela se comprend. Rétrospectivement, la manière dont les perspectives idéalistes des années 90 – principe de sécurité collective, réforme renforçant l’ONU – ont disparu du discours mainstream est alarmante. Avec comme seul horizon la puissance militaire occidentale au service des droits humains et du rétablissement de l’ordre, le monde ne se dirige pas vraiment vers un avenir pacifique.

Dans le cadre du 60e anniversaire de l’OTAN, la Friddensinitiativ organise une conférence et un piquet de protestation
les 20 et 21 mars (détails, voir agenda
pages 2 et 3)


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