POLICE: Sentiments subjectifs

La police constate les effets de la crise économique sur la délinquance – pourtant elle ne propose pas d’alternative au tout-répressif.

Prend les choses très au sérieux: Romain Nettgen.

Les statistiques policières, surtout celles en rapport avec l’évolution de la délinquance, sont toujours à prendre avec précaution. Ainsi, si le taux de criminalité est en constante hausse depuis 2005, cela ne veut pas dire que l’insécurité règne dans les rues de Luxembourg – même si quelques médias, dans un élan de sensationnalisme, ont voulu le faire croire.

En analysant les chiffres en détail, on se rend compte de deux choses. Premièrement, l’augmentation de la délinquance est aussi due à une activité policière en nette hausse, ainsi qu’au meilleur fonctionnement des commissariats de proximité. En d’autres mots : en 2009, le nombre de plaintes a augmenté et avec lui le taux de criminalité mesurée. Et puis, ce n’est pas la « grande » criminalité qui est en hausse, mais surtout les vols avec violence, les vols de téléphones cellulaires, les vols à la tire, les cambriolages et les hold-up contre les stations d’essence – des catégories criminelles liées surtout à la détérioration du climat social. « Depuis quelque temps, nous constatons des vols de vivres, ce qui n’a pas été le cas les années précédentes », rapporte Daniel Reiffers, premier commissaire principal. D’autres indicateurs que le ton monte entre la force publique et la population sont les dégradations en tout genre, également en hausse : qu’il s’agisse de vandalisme ou de graffitis, les indicateurs montrent une nette augmentation. Bien sûr, les agents font aussi les frais d’une telle évolution sur le terrain : les outrages et rébellions à agent ne cessent de se multiplier. C’est pourquoi le ministre de l’intérieur Jean-Marie Halsdorf (CSV), lors de la conférence de presse pendant laquelle ces chiffres ont été dévoilés, a explicitement parlé de « criminalité du pauvre » pour expliquer les chiffres. Faut-il aujouter que les procès-verbaux pour mendicité et vagabondage ont carrément explosé ?

Pourtant, il y a aussi quelques bonnes nouvelles dissimulées ça et là : les homicides volontaires ou non sont en baisse constante, ainsi que les vols de voitures. Par contre, les cambriolages ne cessent d’augmenter – dans leur cas, Daniel Reiffers a évoqué « des bandes qui parfois font plusieurs centaines de kilomètres pour cambrioler des maisons au Luxembourg et puis rentrent chez elles ».

Pour contrer cette évolution, le nouveau directeur général de la police ne promet rien de révolutionnaire : « La police est une composante nécessaire de notre société. Et il faudra encore beaucoup plus de policiers sur le terrain si nous voulons une société sécurisée. » Et d’évoquer que la sécurité serait – selon lui – un facteur de la croissance économique. Avec un taux d’élucidation qui dépasse pour une fois la barre des 50 pour cent, il y a encore du pain sur la planche.

Ce qui n’empêche pas le ministre Halsdorf de miser sur l’effet d’annonce : « En 2011, je présenterai à la Chambre des députés un projet de loi sur une réforme de la police », a-t-il proclamé. Cette réforme concernera l’adaptation de la police aux normes européennes, notamment au fameux programme de Stockholm, inclus dans le traité de Lisbonne. Elle devra, selon le ministre « renforcer le sentiment subjectif de sécurité chez le citoyen » – c’est pas gagné. Mais l’inspection générale de la police (IGP) sera également réformée. Sur ce point, Halsdorf se montre tout de même très prudent : « L’IGP aura peut-être un peu plus de liberté, mais cela dépendra largement des débats parlementaires. » Comme si le syndicat de la police ne demandait pas depuis des années une indépendance réelle de la police des polices, sans quoi celle-ci restera à tout jamais une bonne blague.


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