LOGEMENT: Course d’obstacles

Le Luxembourg n’est pas épargné par des pratiques discriminatoires en matière d’accès au logement. Mais il existe des lois afin de les combattre.

Le Luxembourg serait-il un pays particulièrement tolérant ? En tout cas, jusqu’à ce jour, aucune procédure judiciaire n’a été entamée pour cause de discrimination au logement. Pourtant, des témoignages existent. Tel cet agent immobilier qui a relaté, lors d’une conférence de présentation de brochures éditées par la Caritas destinées aux propriétaires et agences immobilières, cette histoire d’une propriétaire lui enjoignant de ne pas accepter des candidatures d’étrangers.

En Belgique, un tribunal de première instance a pour sa part ordonné à un propriétaire qui avait demandé à son agence de ne louer qu’à des couples « traditionnels », de cesser d’adopter un comportement discriminatoire à l’encontre de personnes homosexuelles.

Pourtant, la législation luxembourgeoise, datant de deux lois de 2006 et 2007, est très stricte, car elle prohibe toute discrimination fondée sur la religion, les convictions, le handicap, l’âge, l’orientation sexuelle, l’origine ethnique et le genre. Les personnes contrevenant à la loi sont passibles d’une peine d’emprisonnement allant de huit jours à deux ans et d’une amende pouvant s’élever de 251 à 25.000 euros.

L’absence de poursuites judiciaires peut toutefois s’expliquer. D’une part, il paraît évident qu’un-e candidat-e à la location soit peu enclin-e à poursuivre un-e propriétaire. La relation entre le propriétaire et le locataire n’en serait que plus détériorée dans l’éventualité d’une location effective. Néanmoins, une telle procédure envers des agences pourrait servir de coup de semonce salvateur face à de telles pratiques. Mais encore faut-il que la législation soit connue. Car si l’injonction à la discrimination d’un propriétaire à l’adresse d’une agence immobilière est punissable, celle-ci engage également sa responsabilité pénale si elle obtempère.

Voilà pourquoi la brochure de la Caritas donne des exemples concrets de « bonnes pratiques » incitant les agents immobiliers à « déconstruire » les stéréotypes véhiculés par les propriétaires. Mais peut-être que la brochure pêche par une certaine naïveté en partant du principe que l’agent lui-même dispose d’une vue plus émancipée que le propriétaire. D’autant plus que ces discriminations peuvent se montrer particulièrement sournoises. Par exemple ces propriétaires, qui, sous prétexte qu’ils ne désirent pas que leurs locataires possèdent un animal de compagnie, veulent en fait, pour certains, exclure les personnes aveugles.

De manière générale, la législation établit une distinction entre la discrimination directe et indirecte. Si l’exemple de l’animal de compagnie peut paraître tiré par les cheveux, la question devient plus concrète lorsqu’il s’agit de personnes handicapées. En effet, la loi stipule qu’il y a discrimination indirecte « lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible de léser des personnes (…) sauf si la pratique en question peut se justifier objectivement par un but légitime ». Par exemple, le propriétaire est considéré comme agissant de manière discriminatoire s’il refuse d’aménager son habitation de manière à ce qu’une personne souffrant d’un handicap puisse y loger. Si le principe de proportionnalité financière le permet, il se voit ainsi contraint de prévoir une rampe d’accès à l’établissement.

Dommage toutefois que la législation ne prévoit pas, de manière plus globale, de sanctionner une discrimination de plus en plus courante sur l’ensemble du territoire : celle que le marché de l’immobilier exerce à l’encontre des pauvres qui sont d’office de plus en plus exclus de la location d’un appartement décent à un prix abordable. Mais sur ce point, c’est une véritable politique du logement qu’il faudrait, le parent pauvre des gouvernements successifs.


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