DEMANDEURS D’ASILE: Nicolas S.

En fermant le bureau d’accueil pour les demandeurs d’asile, le ministre Nicolas Schmit ne veut pas uniquement mettre fin à un hypothétique « tourisme d’asile », mais poursuit bien d’autres buts.

Certes, en ces temps agités, la nouvelle de la fermeture par le ministre de l’immigration du bureau d’accueil pour les demandeurs d’asile a vite été reléguée à la rubrique des chiens écrasés, tant le pays est occupé par des affaires internes et par des règlements de compte pré-électoraux qui secouent le paysage politique. Pourtant, l’affaire est loin d’être anodine. Se pose en premier lieu la question de la légalité d’un tel acte, inédit jusque là. Pour l’Asti, il n’y a pas de doute : fermer le bureau d’accueil est illégal car contraire aux droits de l’Homme. C’est pourquoi d’ailleurs une famille kosovare qui ne pouvait pas déposer sa demande se pourvoit en justice contre cette décision. Mais au-delà de la question légale, demeure celle du sens de cette démarche. Car, tout simplement fermer les bureaux n’aide nullement à pallier à la situation catastrophique à laquelle sont exposés les demandeurs d’asile sur notre territoire. Au contraire même : cela ne va empêcher personne d’entrer au Luxembourg et le jour où les bureaux rouvriront, les fonctionnaires devront faire face à des files encore plus interminables. Et cela ne peut être dans l’intérêt de Nicolas Schmit.

Alors pourquoi s’est-il résolu à cette décision drastique ? Quelques éléments de langage employés par Schmit ce lundi peuvent aider à y voir plus clair. Premièrement, il parle de « tourisme d’asile », une formule qui dénigre d’avance les demandeurs d’asile et qui ne devrait pas se trouver dans son vocabulaire. Personne ne décide d’abandonner son foyer et sa famille juste pour faire du tourisme. Il apparaît alors qu’en employant cette formule, Schmit ne vise pas l’intégralité des demandeurs d’asile, mais seulement une certaine catégorie. Ce soupçon se renforce, quand on sait qu’il a aussi regretté que cette mesure pénaliserait aussi les « autres » demandeurs d’asile. C’est tellement faux-cul, que cela saute même aux yeux du dernier des imbéciles : le ministre Schmit vise les Roms et rien d’autre. Depuis qu’ils peuvent se déplacer librement en Union Européenne (notamment depuis que les ressortissants serbes ne sont plus obligés de disposer d’un visa), ils affluent vers les pays de l’Ouest pour fuir les discriminations qu’ils subissent dans leurs pays d’origine et deviennent donc majoritaires dans le contingent de miséreux qui frappe à nos portes. Un fait connu que les autorités auraient dû prévoir en augmentant notamment leur capacité d’accueil et non pas en mettant la clé sous la porte.

En fait, Schmit ne fait qu’employer la méthode de son presqu’homonyme français, l’autre Nicolas S., Sarkozy en personne. Celui-ci avait aussi essayé de remonter dans les sondages en tapant un grand coup sur les Roms en été 2010. Et comme chacun le sait, grâce au dernier sondage sémi-légal de RTL et du Wort, la cote de Nicolas Schmit est en chute libre – surtout depuis ses démêlés avec la police. Il veut donc remonter par les comptoirs et les zincs, tout en discriminant une population qui depuis des centaines d’années n’a connue que haine et rejet. Par ailleurs, un heureux hasard du calendrier donne à Schmit l’occasion de jouer les héros sur un autre plan : le scandale Pro-Actif, où en tant que ministre du travail, il est au premier plan quand il s’agit de tâcler l’ex-président du LCGB, Robert Weber. Taper sur les gros et les parias : deux recettes qui marchent toujours quand on veut se refaire une santé électorale. D’autant plus que Schmit ne s’est pas mouillé avec le promoteur Flavio Becca.

Mais ce n’est pas tout. En fermant le bureau d’accueil, Nicolas Schmit augmente en même temps la pression sur la ministre de la famille Marie-Josée Jacobs, qui peine tellement à trouver des places d’accueils pour les demandeurs d’asile qu’elle doit les parquer sur des campings.

Remonter dans les sondages et taper sur le partenaire de coalition, voilà bien des raisons qui valent qu’on exclue des familles entières de l’accueil qui leur est dû en fonction des conventions internationales signées par le Luxembourg. Enfin, quand on est un ministre socialiste qui peine à trouver un autre boulot dans le privé ou à l’OCDE?


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