CENTRALES NUCLÉAIRES: Prolongation, danger !

Faut-il recycler les centrales nucléaires ? Greenpeace voudrait les mettre au rebut et insiste sur les problèmes liés à une éventuelle prolongation de leur durée d’exploitation.

Utiliser des objets aussi longtemps qu’ils peuvent servir constitue une attitude économe, encouragée au nom de la protection de l’environnement. Parfois, le choix est difficile, quand on réfléchit à remplacer un vieux réfrigérateur de classe D en état de marche par un nouveau de classe A. Et puis, il y a les centrales nucléaires.

Construites pour durer à peu près 40 ans, elles restent en parfait état de fonctionnement, affirment les groupes auxquels elles appartiennent. Dommage donc de mettre à la retraite ces réacteurs de manière prématurée, alors qu’ils pourraient continuer à fournir l’humanité en électricité… et leurs actionnaires en dividendes. Pas du tout, estime Greenpeace, qui, mercredi dernier, a présenté une étude sur la problématique de la prolongation de la durée de vie des centrales. Certes, pour les antinucléaires, seule une centrale à l’arrêt est une bonne centrale. Mais, comme le montre le rapport de l’ONG « Vieillissement des réacteurs : l’Europe au seuil d’une nouvelle ère de risques nucléaires », les « séniors du parc nucléaire » sont des représentants particulièrement dangereux de leur espèce.

Tout d’abord, les marges de sécurité existant initialement sur la résistance des matériaux sont grignotées au fil des ans du fait de l’usure normale. Or, le remplacement des composantes se heurte à de nombreuses limites. Techniquement parlant, certaines composantes sont difficiles voire impossibles à échanger, comme la cuve du réacteur et son enceinte de confinement. Economiquement parlant, cette modernisation coûte cher, à un tel point que dans plusieurs cas les exploitants ont renoncé à la prolongation au vu des exigences des autorités de sécurité nucléaires. En fait, mettre à niveau veut en principe dire appliquer les standards de sécurité nouveaux, fruits des mauvaises expériences passées. Ainsi, à Fukushima, c’est le bloc 1 qui a fondu en premier, tandis que les blocs les plus récents ont tenu le coup.

Dans le rapport de Greenpeace, cet état des choses est visualisé par une courbe en baignoire : en début d’exploitation d’un réacteur neuf, les risques d’accident sont élevés mais baissent rapidement. Ensuite, les mises à niveau successives réussissent de moins en moins à maintenir un niveau de risque acceptable. Surtout, l’incertitude de savoir quelle composante pourrait faillir et avec quelle probabilité, augmente fortement.

Dangereux séniors

Au Japon, l’arrêt des centrales a conduit à une augmentation de la production d’électricité de source fossile, contribuant au changement climatique. Ce n’est pas une fatalité, estime Greenpeace, les politiciens n’auraient qu’à appliquer des scénarios de recours aux énergies renouvelables – coûteux économiquement, mais faisables. Stephan Kurth de l’Öko-Institut estime même qu’une phase de recours accru aux fossiles peut être nécessaire, mais souligne qu’il faut préférer les centrales fossiles modernes, notamment au gaz naturel. Un gaz importé depuis la Russie, Etat dont l’attitude envers l’écologie comme envers les libertés publiques pose pourtant de grands problèmes…

Alternativement, mettre à la retraite les vieilles centrales livre aussi une justification pour en construire de nouvelles. Il est indéniable que les centrales les plus récentes sont mieux conçues que leurs prédécesseurs – mais pas encore assez bien. Une partie des experts pro-nucléaires recommandent d’attendre la quatrième génération… qui ne sera prête qu’en 2030. Or, toute « pause nucléaire » comporte des risques pour l’industrie atomique : elle perd sa maîtrise technique et peut voir l’opinion politique se retourner contre elle. D’un point de vue stratégique, une prolongation de durée de vie d’une partie des centrales, combinée avec un moratorium sur les nouvelles constructions ne serait peut-être pas si mal. Cela signifierait en effet la fin lente, mais programmée de l’énergie nucléaire.


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