WORLD MUSIC: Une voix ouverte au monde

Née en Espagne, la chanteuse Buika mêle les sonorités du flamenco aux réminiscences du pays de ses ancêtres, la Guinée équatoriale, tout en s’ouvrant aux influences anglo-saxonnes maintenant qu’elle réside à Miami. Un concentré d’origines et un hommage à la puissance créative de la migration à découvrir bientôt à la Philharmonie.

Buika sur scène, c’est une expérience intense tant pour les spectateurs que pour l’artiste.

« New Afro Spanish Generation », tel est le titre de la chanson d’ouverture de l’album « Buika », deuxième opus de la chanteuse espagnole, en 2005. Si la musique adopte un style latin jazz plutôt convenu, le mélange d’anglais et d’espagnol, la voix déjà assurée et surtout le thème développé préfigurent l’œuvre à suivre. L’artiste semble à son aise dans le mélange des genres et l’évocation du brassage des origines, qui permettent la rencontre musicale et humaine. Tour à tour, l’album décline de la soul, du funk et du flamenco ; dans ce dernier style, Buika subjugue par la voix chaude et rauque qu’elle a perfectionnée au sein de la communauté gitane de Palma de Majorque.

Après cet album prometteur mais quelquefois un peu fourre-tout, le mélange des genres aurait pu tourner à l’inventaire stérile ; ce don hors du commun, cette ample voix africaine qui adopte les mélismes torturés du flamenco espagnol, aurait pu se diluer dans une world music ordinaire. Intuition géniale, Buika s’entoure alors du producteur espagnol Javier Limón qui, dans la trilogie d’albums qui suit, canalise son inspiration pour en tirer la quintessence. Avec « Mi niña Lola », les sons électroniques font place à une mise en valeur d’orfèvre de sa voix sensuelle et expressive, grâce à des instrumentistes chevronnés. « Niña de fuego » continue dans cette veine en faisant la part belle à la « copla », un style de chanson populaire espagnole à son apogée durant les années 1940 à 1960. Puis vient « El último trago », duo intimiste avec le pianiste cubain Chucho Valdés où la voix de Buika se transforme, moins rauque, plus aiguë, plus romantique.

Mise sur orbite, la chanteuse peut alors voler de ses propres ailes et signer textes et musiques pour nombre de chansons sur ses albums suivants. Parue en 2011, l’anthologie « En mi piel » regroupe l’essentiel du parcours de la chanteuse en dix ans de studio, avec quelques morceaux inédits et une longue version envoûtante du classique mexicain « Volver volver » enregistrée au North Sea Jazz Festival de Rotterdam. La porte d’entrée idéale pour l’univers de l’artiste.

Repérée d’abord avec ses enregistrements, Buika a fait également un passage remarqué dans le film « La piel que habito », de Pedro Almodóvar, où elle interprète deux chansons. Tout naturellement, l’écriture de paroles l’a conduite à publier un recueil de poésie qu’elle a présenté il y a quelques semaines. Comme en hommage à ses racines africaines et à la langue bubi, menacée de disparition et qu’elle parlait enfant, ce livre écrit en espagnol est signé également de son nom tribal, Kitailo. Un nom qui accompagne ceux de ses proches à même la peau de son bras gauche.

Chanteuse à multiples facettes, compositrice, auteure… l’Espagnole donne pourtant, de l’avis des observateurs avisés, le meilleur d’elle-même sur scène. Ses concerts dispensent une énergie communicative, et il n’est pas rare qu’elle improvise des couplets entièrement nouveaux, allongeant d’autant les morceaux proposés. Un phénomène donc, et pas seulement une voix exceptionnelle, qui posera ses valises le temps d’un unique concert au grand-duché. Les amateurs de musique du monde en seront à l’évidence comblés.

À la Philharmonie, lundi 23 mars à 20h.


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