Communales : Votants fantômes

La participation des étrangers aux communales reste un enjeu important pour la démocratie dans un pays à la démographie aussi particulière que le Luxembourg. Mais de là à prendre vraiment au sérieux le sujet, le chemin est long.

Le chiffre est tombé il y a une quinzaine de jours : 47,7 pour cent des résidents du Luxembourg n’ont pas la nationalité luxembourgeoise, selon le Statec. S’il n’est pas surprenant et qu’il reflète bien la croissance du pays, rares sont ceux qui l’associent directement à la question de la représentativité de la démocratie au Luxembourg. Déjà qu’en 2015, lors du désormais tristement célèbre référendum, 80 pour cent des Luxembourgeois avaient claqué la porte de l’accès au vote législatif à leurs voisins non-luxembourgeois, la participation aux communales en devient d’autant plus importante.

Et pourtant. Même si la campagne – et notamment le site « jepeuxvoter.lu » – a bien été mise en place, les premiers résultats (il fallait s’inscrire sur les listes électorales avant le 13 juillet) qui viennent de tomber restent maigres. Pour l’instant, il n’y a que la capitale qui vient de communiquer ses chiffres. Malgré une hausse du pourcentage d’inscrits de 39 pour cent, il n’y a pas de quoi crier victoire. Par rapport aux communales de 2011, la population totale de la ville a augmentée de 95.000 à 115.000. En 2011, les étrangers inscrits représentaient 5,5 pour cent de la population résidente. En 2017, ils ne sont que 5,4 pour cent. En chiffres, cela donne 6.307 personnes. Certes, ils représentent toujours 17 pour cent de la population non-luxembourgeoise – un résultat supérieur à la moyenne nationale de 2011, qui, selon le Cefis, était de 10 pour cent. Mais par rapport aux efforts dévolus et au sérieux de la question, cela reste frustrant.

Même s’il faut attendre encore un peu pour se prononcer définitivement, comme Sandy Fournelle de l’Olai l’a expliqué au woxx : « Nous ne publierons les chiffres définitifs qu’au début du mois d’août. Certains dossiers de personnes qui ont introduit des recours parce que leur inscription a été refusée restent en suspens ». Il peut y avoir un tel refus quand une durée de résidence d’au moins cinq ans, telle que demandée par la loi électorale, ne peut être clairement prouvée. Mais le temps d’attente se justifie aussi par le fait que pour ces élections, le processus d’inscription a été modifié : ce ne sont plus les registres communaux qui sont utilisés, mais le registre national – ce qui permet plus d’efficacité, notamment en matière de durée de résidence.

Quant aux moyens utilisés, Fournelle est formelle : « Nous avons disposé du même budget que pour la campagne de 2011. Mais il a été utilisé de façon différente, dans un souci de plus d’efficacité. Ainsi, le Cefis a par exemple formé beaucoup plus de ‘multiplicateurs’ personnels, qui sont directement allés à la rencontre des résidents non-luxembourgeois », explique-t-elle.

Il est vrai que ces derniers mois, lors des marchés publics et autres festivités urbaines, on pouvait rencontrer des stands avec le logo de l’action « Je peux voter » par-ci et par-là. Pourtant, ils ne représentaient pas vraiment une concurrence significative pour les stands de bière et de Mettwurscht.

Alors qu’il s’avère difficile d’extrapoler une tendance nationale à partir des résultats – pas encore définitifs – de Luxembourg-ville, il serait tout de même surprenant si les résultats des autres grandes et petites communes s’en différenciaient beaucoup.

On ne peut que spéculer sur les raisons de cette non-évolution. Tandis que certains politiciens tentent de mettre ça sur le dos des résidents étrangers qui seraient désintéressés par la politique locale, d’autres vont plus loin. Ainsi, Lydie Polfer – citée dans un article de Pierre Lorang sur le sujet dans le dernier numéro de « forum » – y voit une marque de satisfaction des résidents étrangers, qui se sentiraient tellement à l’aise dans leur commune, qu’ils ne verraient pas le but d’aller voter.

Cette attitude reflète bien l’ignorance de beaucoup trop de politiciens communaux – tout comme leur désir de ne pas voir la donne changer. Une donne qui leur a surtout permis de conquérir le pouvoir. Pas sûr qu’avec un vote étranger plus important, les résultats seraient les mêmes.

Reste la question : est-ce que le résultat du référendum joue un rôle dans l’absence d’engouement de la part des résidents non-luxembourgeois ? Espérons que le rapport du Cefis sur la campagne de 2017 (qui paraîtra en février 2018) se penchera sur la question.


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