Élections américaines : Ne pas se trumper de cible

Le grand cirque électoral étasunien n’avait depuis bien longtemps plus rien à voir avec le débat d’idées. Pourtant, pour s’expliquer comment on en a pu arriver à ce stade, se foutre de Donald Trump ne suffit pas.

© flickr_matt brown

S’il devait vraiment quitter le Bureau ovale en janvier prochain, le président actuel des États-Unis laisserait un grand vide pour plusieurs catégories de professionnel-le-s, comme les caricaturistes et humoristes en tout genre. Sa fourberie, ses conneries, son physique ingrat tout comme sa trop haute estime de lui-même font de lui la cible presque trop parfaite de moqueries en tout genre. Mais le propos de cet édito n’est pas d’en rajouter une couche. Honnêtement, un président américain qui pense que la grippe espagnole aurait contribué à mettre fin à la Seconde Guerre mondiale est un cas à confier au spécialistes gérontologues et pas à discuter dans le débat démocratique.

De toute façon, Trump n’est qu’une tumeur, un carcinome hideux sur lequel poussent des poils blonds épars. Les vraies cellules cancéreuses qui le composent, ce sont le parti républicain et les activistes d’extrême droite qui ont aidé à l’introniser – et qui profitent de son ultraprésence et de la diversion qu’il crée. Comme le leader du Sénat Mitch McConnell, qui dans le sillage du clown de la Maison Blanche bloque toute législation passée par le Congrès sous contrôle démocrate, tout en se remplissant les poches. Ou encore Steve Bannon, l’activiste proto-fasciste qui l’a fait élire et qui, après une mauvaise passe, est en train de regagner la confiance du président et de son entourage. Citons encore Stephen Miller, que des ONG américaines, comme le Southern Poverty Law Center, qualifient d’homme d’extrême droite, à claires tendances racistes, qui profite de sa fonction de haut conseiller du président pour influencer la législation.

Ce constat fait, reste à déterminer la question de la responsabilité. Et là, l’establishment démocrate n’est pas blanc comme neige. Sa faute capitale : ne pas vouloir admettre ni même voir que les huit années de l’administration Obama ont été un échec. Que le « hope » et le « change » promis ne sont jamais arrivés chez celles et ceux qui en auraient eu besoin et qui avaient voté pour. Certes, il y a eu des progrès, et certaines des réformes nécessaires, comme celle de l’assurance maladie, ont buté sur des écueils politiques, idéologiques et surtout financiers – les opposant-e-s à la réforme phare du système de santé étant toutes et tous inféodé-e-s à l’industrie pharmaceutique. Pourtant, au lieu de prendre conscience de ce maigre bilan et d’essayer de faire mieux et plus efficace, le parti démocrate s’est laissé aller à un aveuglement mortifère similaire à celui de la social-démocratie européenne – prise depuis des années dans une sorte de tourmente d’automutilation quasi obsessionnelle.

La faute capitale des démocrates : ne pas vouloir admettre ni même voir que les huit années de l’administration Obama ont été un échec.

Si miser sur Hillary Clinton a permis de faire élire Donald Trump, comment Joe Biden pourrait-il faire mieux ? Il appartient à la même clique, au même monde dynastique de régents démocrates américains. Certes, choisir comme colistière Kamala Harris, une femme de couleur qui a fait ses preuves, était une bonne manœuvre – même si sa collaboration avec le fils – décédé – de Joe Biden, Beau Biden, quand elle était procureure de l’État de Californie va sûrement être ciblée par les républicains.

Au lieu de se concentrer, comme en 2016, sur les sondages qui donnent les démocrates gagnants de ces présidentielles (ce qui peut mener à de grandes déceptions), les progressistes feraient mieux de planifier comment reconstruire leur pays. Si Trump a réussi à démonter tout l’héritage Obama, c’est aussi parce que celui-ci n’était pas gravé dans le marbre. La génération inspirée par Bernie Sanders et son mouvement socialiste démocrate a encore du pain sur la planche.


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