Le 1er août, l’humanité a atteint le « jour du dépassement », date symbolique à laquelle les ressources que la Terre est capable de produire en un an ont toutes été épuisées. À cette occasion, la plateforme Votum Klima a alerté le grand public et les dirigeant·es sur l’urgence de revoir notre façon de consommer.

(Copyright : Anaïs Hector)
C’est un record peu glorieux qui vient d’être une nouvelle fois battu : cette année encore, le jour du dépassement de la Terre (Earth Overshoot Day) est arrivé plus tôt que l’année précédente. Le 1er août, en sept mois à peine, la population mondiale a ainsi déjà épuisé les ressources naturelles que la planète mettrait un an à régénérer. C’est un jour de moins qu’en 2023.
Exception faite de 2020, où, en raison de la pandémie de covid-19, le jour du dépassement avait eu lieu trois semaines plus tard qu’en 2019, cette date n’a cessé d’avancer depuis le début des années 1970, lorsque le déficit écologique a commencé à se creuser. En 1971, le jour du dépassement s’établissait alors au 25 décembre. Pour obtenir cette date butoir, l’organisation Global Footprint Network effectue des calculs basés sur l’empreinte écologique de l’humanité (sa consommation en ressources écologiques) et la capacité de régénération de la Terre, elles-mêmes calculées à partir de données produites par des rapports nationaux ou des Nations unies.
Non sans humour et en clin d’œil aux Jeux olympiques, la plateforme Votum Klima, qui réunit plus d’une dizaine d’associations, dont Greenpeace et le Centre for Ecological Learning Luxembourg (Cell), a voulu à cette occasion tirer la sonnette d’alarme. Elle a ainsi organisé mardi dernier une course symbolique sur la piste d’athlétisme du campus Geesseknäppchen entre la Terre et le Luxembourg. Représentés respectivement par un énorme ballon et un Roude Léiw chargé de symboles de surconsommation, les deux concurrents avaient pour mission d’atteindre la ligne d’arrivée, marquant le point d’équilibre entre la régénération des ressources naturelles et leur prélèvement par l’activité humaine.
Le Luxembourg en bas du classement
Échec cuisant pour chacun d’eux, puisque, rappelons-le, le Luxembourg a atteint à titre individuel son jour de dépassement le 20 février. Ce qui en fait le deuxième pays au monde à franchir le plus tôt la date fatidique, juste après le Qatar, et le place même en pole position au niveau européen. Si tout le monde vivait comme au Luxembourg, il faudrait sept planètes pour subvenir à nos besoins !
« Certes, le pays est petit, sa population est dense, la surface bétonnée est importante et les travailleurs frontaliers ainsi que le tourisme à la pompe pèsent dans la balance. Mais la consommation d’énergies fossiles, pour se déplacer et se chauffer, demeure trop élevée. Elle représente autour de 80 % de la consommation énergétique totale », commente Frédéric Meys, de Greenpeace. Si des efforts ont été faits pour développer les énergies durables ou pour réviser le Plan national intégré en matière d’énergie et de climat (woxx 1797), Votum Klima appelle toutefois à des mesures « plus efficaces » – comme le développement de la taxe carbone socialement équitable ou l’extension des transports publics – pour atteindre les divers objectifs fixés, dont 35 % d’énergies renouvelables en 2030.
À l’échelle mondiale, outre l’utilisation d’énergies fossiles, la déforestation, la surpêche et l’agriculture industrielle mettent à mal la planète, et les conséquences du mode de vie des pays développés se font particulièrement sentir sur les pays pourtant les moins responsables de cette situation. Les pays à revenu élevé utilisent six fois plus de matériaux par habitant·e et génèrent dix fois plus d’impacts climatiques par habitant·e que les pays à faible revenu, rappellent les Nations unies.
Mais des solutions existent pour faire reculer le jour du dépassement global, qui passeraient tant par la réduction de l’empreinte carbone de l’humanité que par la restructuration de la nature : reforestation, réduction de la consommation de viande et du gaspillage alimentaire… Au Luxembourg, Votum Klima insiste particulièrement sur l’urgence de « développer l’économie circulaire par le réemploi et le partage, la sobriété énergétique et la mobilité partagée ».
« Sans un changement profond de notre économie, de notre société et de nos modes de gestion et de gouvernance, la transition écologique ne pourra pas aboutir. Il faut changer de paradigme, remettre en cause la croissance économique comme seul étalon de réussite sociétal et mettre en place des actions politiques ambitieuses et socialement justes. D’autant que, lorsqu’ils ont toutes les informations en main, les citoyens sont souvent prêts à des changements radicaux », soutient Magali Paulus, du Cell.