Migration et asile : C’est compliqué

Plus d’arrivées que l’année dernière, pas assez de logements disponibles et beaucoup de personnes détenues au centre de rétention : les ministres Asselborn et Cahen ont fait un bilan de l’année 2017 en termes de migration et d’asile.

Les ministres Asselborn et Cahen ont fait leur traditionnel bilan de l’année passée en termes de migration et d’asile. (Photo : MAEE)

C’est sur fond de – petite – polémique quant aux conditions de vie dans la Structure d’hébergement d’urgence au Kirchberg (Shuk) que les ministres Asselborn et Cahen ont donné leur traditionnelle conférence de presse de clôture de l’année dernière en matière de migration et d’asile. La structure, réservée aux demandeurs et demandeuses d’asile débouté-e-s ou tombant sous le coup des règlements Dublin en attente de leur expulsion, avait été critiquée par l’association « Passerell ».

Des 606 personnes assignées à la Shuk depuis son ouverture le 1er avril 2017, 351 ont disparu et 41 ne s’y sont pas du tout présentées. 54 ont été transférées vers un autre État membre de l’Union européenne. 95 personnes y étaient toujours présentes au 31 décembre.

Devant la presse, Jean Asselborn a affirmé que la Shuk n’était qu’une « structure provisoire » et a appelé de ses vœux l’ouverture d’une « maison de retour » – une structure d’ailleurs prévue par l’accord de coalition et réclamée par certaines associations.

Une crise dans la crise

La crise du logement a de sérieuses incidences sur la gestion des arrivées de réfugié-e-s au Luxembourg – c’est une des conclusions de la conférence de presse de mardi. 47 pour cent des habitant-e-s des structures d’accueil sont en effet des bénéficiaires de protection internationale, auxquel-le-s le statut de réfugié-e a donc déjà été accordé. En octobre 2016, ils/elles ne représentaient encore qu’un tiers des habitant-e-s des structures d’accueil, selon les dires du directeur de l’Olai.

Une crise dans la crise, dont la fin ne semble pas proche. Les arrivées de demandeurs et demandeuses d’asile au Luxembourg en 2017 sont à nouveau en hausse par rapport à l’année précédente. Et les mesures du gouvernement en matière de logement ne suffiront certainement pas pour lutter efficacement contre la crise du logement qui concerne autant les autochtones que les nouveaux/nouvelles arrivant-e-s.

2.322 arrivées de demandeurs et demandeuses d’asile ont été enregistrées par la Direction de l’immigration en 2017, contre 2.035 en 2016. Sans toutefois atteindre le chiffre record de 2015, au pic de la « crise des réfugié-e-s », où 2.447 personnes étaient arrivées au Luxembourg.

La Syrie reste le premier pays d’origine des arrivant-e-s, ce qui est en partie dû aux mécanismes de relocalisation au sein de l’Europe, qui ont été à l’origine de l’arrivée de 165 personnes (dont 134 originaires de Syrie) depuis la Grèce et de 188 personnes (dont 175 originaires de Syrie) depuis l’Italie. Au deuxième rang des pays d’origine des arrivant-e-s se trouve l’Érythrée, suivie par le Maroc, la Serbie et l’Algérie.

La Direction de l’immigration a considérablement augmenté sa cadence de travail en 2017 : 3.186 décisions prises, c’est 867 de plus que l’année précédente. Il faut dire qu’elle avait vu ses effectifs augmenter aussi. Parmi ces décisions, les décisions d’incompétence sur base des accords Dublin ont fait un bond considérable : elles ont augmenté de 98 pour
cent !

Dans 36 pour cent des cas (1.152 personnes), les demandeurs et demandeuses d’asile se sont vu octroyer le statut de réfugié-e, et dans 1,7 pour cent des cas (54 personnes), ils/elles peuvent bénéficier du statut conféré par la protection subsidiaire. 62 pour cent des décisions prises ont été des décisions négatives. 321 personnes ont essuyé un refus dans le cadre d’une procédure dite « accélérée ».

Plus de personnes au centre de rétention

La situation des mineur-e-s non accompagné-e-s a été relevée en particulier dans le rapport annuel de la Direction de l’immigration. Ils/elles ont été 50 à arriver en 2017, par rapport à 51 en 2016. Alors qu’en 2016, l’Afghanistan était en tête des pays d’origine, l’Albanie et le Maroc le sont cette année. Par ailleurs, la Direction de l’immigration a conclu un accord avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) en vue de rechercher les parents des réfugié-e-s mineur-e-s non accompagné-e-s dans leur pays d’origine.

Si, au début de la législature, on avait pu espérer voir une baisse du chiffre des personnes détenues au centre de rétention – notamment grâce à la création, prévue dans l’accord de coalition, d’une « maison de retour », il n’en est rien dans les faits. En 2017, 493 personnes ont été détenues au centre de rétention – une bonne centaine de plus qu’en 2016. Parmi elles, une grande majorité d’hommes (376). 28 familles, représentant un total de 101 personnes, y ont été détenues au cours de l’année. La durée moyenne de rétention étant de 27 jours pour 2017, 19 personnes y ont été détenues pour une durée égale ou supérieure à 120 jours.

La « crise des réfugié-e-s » s’installe dans la durée au Luxembourg. Si un changement des populations et des pays d’origine semble s’opérer, les arrivées ne tarissent pas pour autant. La situation sur le marché du logement et le manque de perspectives pour beaucoup de demandeurs et demandeuses d’asile constituent un cocktail explosif. Bien gérer les arrivées ne suffit plus : une stratégie à moyen et long terme, incluant l’intégration des arrivant-e-s et la création de perspectives en leur faveur, est désormais une nécessité absolue.


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