Politique culturelle : Come Clean !

Les assises culturelles de ce weekend sont aussi une façon de faire le bilan de la politique culturelle menée lors de cette législature. Un bilan qui se présente pourtant bien maigrichon et partiellement catastrophique.

Pour prendre la température du sentiment sur la politique culturelle actuelle dans la société luxembourgeoise, référons-nous à deux petites anecdotes fraîches de cette semaine. Primo : mercredi, le Tageblatt publiait un de ces microsondages remplis par son lectorat, où la question portait sur comment était perçu le financement de la culture. Résultat : 42 pour cent des personnes ayant rempli le formulaire estimaient que l’argent public investi dans la culture était du gaspillage. Certes, la pertinence de ce sondage en ligne est plus que douteuse. N’empêche que l’émoi sur les réseaux sociaux a été grand : il y avait les (semi-)professionnel-le-s de la scène qui commentaient amèrement et s’adonnaient au pessimisme culturel et les cyniques qui en profitaient pour dire tout le mal qu’ils pensaient de ces fainéants d’artistes improductifs qui vivent des impôts des autres.

La politique culturelle devrait se reconcentrer sur l’essentiel : garantir les droits culturels de toutes/tous les citoyen-ne-s.

Deuxième moment : une chronique de la journaliste culturelle Valerija Berdi sur la radio socio-culturelle 100,7. Berdi s’y attaque au processus de sélection des livres qui seront présentés au stand luxembourgeois de la prestigieuse Foire du livre de Francfort cet automne. Elle se plaint notamment de pantouflages et de népotismes qui sautent aux yeux quand on compare le premier projet de liste à la version définitive. Et aussi du silence du ministère de la Culture, qui n’a pas voulu répondre à ses questions et a même imposé le silence à la coordinatrice employée par le ministère et l’Agence luxembourgeoise d’action culturelle (Alac).

À ces deux microévénements, on pourrait en ajouter tant d’autres : le lâchage médiatique d’Enrico Lunghi, les scandales à répétition autour d’Esch 2022… mais cela prendrait trop longtemps. Force est de constater que les débats autour de la politique culturelle au Luxembourg sont essentiellement guidés par la frustration. Celle des artistes qui s’opposent à un ministère opaque quant à ses mécanismes de prise de décisions et qui semble souvent arbitraire, sinon dépassé. Et celle d’un public qui perçoit les pantouflages parfois à juste titre comme un gaspillage. Pour ne rien arranger, certain-e-s politicien-ne-s n’hésitent pas à surfer sur ce ressentiment, mettant en danger des acquis obtenus de haute lutte par la scène culturelle. On pense notamment à Maggy Nagel, qui a requalifié le statut d’artiste en « aides sociales ». Comme si les artistes, qui souvent vivent très précairement en assumant leur choix de vie et qui ne comptent pas leurs heures de travail, étaient des assisté-e-s.

Que faire donc pour mettre fin à la méfiance sur tous les fronts ? D’abord, il faut une définition admise par tous de ce que la politique culturelle doit être et de ce qu’elle ne doit pas être. Pour cela, il faudrait peut-être penser dans le sens inverse de ce qui est communément admis, donc faire moins pour se permettre de faire plus. En d’autres mots : la politique culturelle devrait se reconcentrer sur l’essentiel – garantir les droits culturels de toutes/tous les citoyen-ne-s. Et cela ne se limite sûrement pas à quelques tickets gratuits pour allocataires de vie chère à la Philharmonie.

Il s’agirait plutôt de sensibiliser toute la population à ses droits culturels, qui dépassent de loin celui à la consommation de la culture, mais impliquent sa consultation et son implication active. Le rôle d’un ministère de la Culture en serait réduit à être la caution morale de ces droits, et plus de choisir derrière des portes closes qui subventionner ou non. Si on soumettait ce processus à une assemblée démocratique incluant la société civile, à inventer encore, la confiance du public comme des artistes en serait la grande gagnante – et le débat sûrement moins toxique.


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