Pour la première fois dans son existence, la présidence de l’Eurogroupe ira à un représentant d’un pays du sud de l’Union, apparenté socialiste de surcroît.
Le soutien inconditionnel de Xavier Bettel n’aura rien changé. Le conseil des 19 ministres des Finances de la zone euro a décidé hier d’attribuer la présidence de l’Eurogroupe à Mario Centeno, l’actuel ministre des Finances portugais. On aurait pu s’en douter : déjà lors de la visite d’État au Japon la semaine dernière, Pierre Gramegna avait obstinément refusé de répondre aux questions concernant son éventuelle candidature à ce poste. « Le ministre des Finances ne répondra qu’à des questions concernant la visite d’État », était la consigne donnée aux journalistes de la délégation médias. Gramegna pressentait-il que ses collègues ne voudront pas d’un deuxième Luxembourgeois à un des postes-clés de la hiérarchie bruxelloise ? Peut-être. En tout cas, même si Bettel se plaignait des chrétiens-sociaux et des sociodémocrates, qui se répartiraient ces postes importants, laissant de côté les libéraux, la zone euro a pour une fois fait un choix contre la doctrine néolibérale pur jus.
Un jongleur entre les doctrines économiques
Car même si Centeno est un économiste diplômé de Harvard, il a fait ses armes dans un gouvernement alliant socialistes et extrême gauche qui a réussi à faire sortir un pays fauché de la crise sans appliquer les cures d’austérité préconisées par les hardliners bruxellois. Artisan des consensus difficiles au sein du gouvernement portugais, Centeno a réussi la prouesse de se faire respecter même par son ex-homologue allemand Wolfgang Schäuble (qui préside le Bundestag, le parlement allemand depuis peu). Bref, il a percé là où le gouvernement Syriza grec a dû capituler devant le diktat de la Commission européenne, en négociant âprement entre faucons et adversaires d’une politique basée sur l’austérité.
Reste à savoir si ses capacités consensuelles suffiront à mener à bien l’immense chantier qui l’attend, à savoir l’approfondissement de la zone euro voulu entre autres par le président français Emmanuel Macron. Face à une Allemagne qui – à cause de son instabilité du moment – ne pèsera peut-être plus autant qu’avant dans la zone euro pour un moment, l’opportunité d’un changement politique profond dans toute la zone euro est donnée. Il faudra juste que Centeno sache la saisir. En tout cas, il ne pourra pas faire pire que ses prédécesseurs Jeroen Dijsselbloem et Jean-Claude Juncker, dont le management de la crise de l’euro a montré les pires défauts de l’Union européenne.
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