En 2006, les prix à la vente n’ont augmenté que faiblement par rapport aux années précédentes. Cela rassure le ministre du logement, mais ne console pas ceux aux revenus modestes.
Fernand Boden est satisfait. On dirait même que le ministre du logement (CSV) est content. Non pas parce qu’il a su se maintenir au gouvernement depuis 1979 sans que personne ne sache trop pourquoi. Non, Boden est satisfait de l’évolution des prix de l’immobilier au logement. Lundi dernier, en présentant le rapport d’activités de l’Observatoire de l’habitat pour l’année 2006, le ministre a commencé par le constat suivant: si, depuis 2003, les prix de ventes demandés dans les annonces pour les maisons ont augmenté chaque année de 6 %, la progression pour 2006 n’a été que d’un seul pour cent, ce qui, à ses yeux, „n’est pas considérable“.
Crée en 2003, l’Observatoire de l’habitat récolte les données dans le domaine du logement dans le but de mieux planifier les politiques en question. Ces données fournissent des indicateurs portant sur les prix de vente et de location annoncés, le confort des logements, la consommation foncière et le potentiel foncier constructible.
Ainsi, la collecte des données brutes par le biais d’annonces (presse quotidienne, presse spécialisée et internet) révèle, pour l’année 2006, une forte augmentation des annonces de vente, passant de 3.380 pour les maisons au premier trimestre à 6.803 au dernier et de 4.865 pour les appartements à 8.203. Les annonces en location de maisons et d’appartements dénotent également d’une certaine tendance à la hausse sur les quatre trimestres (29 % pour les maisons et 66 % pour les appartements). Aux yeux de Boden, cette augmentation résulte d’une dynamique sur le marché du logement due à l’ensemble des mesures prises par le gouvernement. Certes, si ces chiffres témoignent d’une tendance lourde, l’on ne sait réellement dans quelle mesure ils correspondent à la réalité, étant donné qu’ils se limitent aux maisons et appartements mis en annonce et non en vente sans passer par ces intermédiaires.
Néanmoins, il est difficile d’y trouver matière à réjouissance: à l’augmentation des mises en vente ou location correspond celle des prix. Ainsi, au niveau des locations, l’indice des prix est passé de 98,42 au premier trimestre à 100,7 au quatrième pour les appartements et de 84,87 à 86,37 pour les maisons. Si l’on prend en compte que la base indiciaire de 100 se réfère au second trimestre de l’année 2003, l’on constate une nette baisse pour la location de maisons et une légère hausse pour les appartements. Côté ventes par contre, avec la même base indiciaire, les appartements se situent à 124,15 et les maisons à 115,55. Une augmentation plus forte, donc.
Il reste que de légères hausses ou des quasi-stagnations continuent à représenter un problème. Qu’importe en effet que des prix déjà trop élevés ne fondent pas sensiblement? La crise du logement ne touche pas les mieux lotis. Mais elle se fait ressentir auprès de celles et ceux qui, d’un côté, ne peuvent se porter candidat auprès du Fonds du logement, et de l’autre, ne disposent pas de ressources suffisantes pour accéder à la propriété. Et c’est là où le bât blesse. Dans la capitale par exemple, les prix au mètre carré ont tendance à augmenter à mesure que la taille du logement diminue: pour un studio, un mètre carré valait l’année passé 4.342 euros, et seulement 3.484 euros pour un appartement à quatre chambres ou plus.
Plus c’est petit, plus c’est cher
C’est naturellement sans surprise qu’en 2004, les ménages disposant d’un revenu considéré comme inférieur (c’est-à-dire moins de 1.800 euros par mois), et qui constituent le quart de l’ensemble des ménages résidant au pays, étaient cinq fois plus nombreux, comme le note le rapport de l’Observatoire, à éprouver des difficultés financières. L’étude EU-SILC rappelle à ce sujet que pour un ménage dont le revenu est de 1.300 euros par mois, le coût moyen de l’emprunt ou du loyer en grignote 24 %, alors que ce taux n’est que de 16 % pour un ménage disposant de 3.100 euros par mois (niveau de vie moyen).
D’ailleurs, le bilan 2006 du Fonds du logement, qui a également été présenté cette semaine, mentionne une évolution intéressante: cette année-là, les candidats à la location d’un logement social dont le revenu mensuel imposable se situe entre 1.400 et 1.600 euros, se retrouvent en tête par rapport aux autres catégories de salarié-e-s, y compris de celle qui leur est inférieure, c’est-à-dire celle qui touche entre 1.000 et 1.200 euros par mois.
Daniel Miltgen, le directeur du Fonds du logement, explique qu’il n’a pas encore pu, faute de temps, analyser les raisons de ce basculement. „C’est peut-être la difficulté croissante pour se loger qu’éprouvent de plus en plus de personnes vivant au-dessus du salaire minimum“, tente-t-il d’expliquer. Si les candidat-e-s de nationalité luxembourgeoise continuent à représenter la majorité des demandeur-euses d’un logement social, malgré une légère baisse par rapport à l’année précédente (36 % par rapport à 37,7 % en 2005 et 42 % en 2004), il faut aussi remarquer une recrudescence des candidat-e-s portugais-e-s, alors que leur nombre était en régression constante depuis plusieurs années. Côte classe sociale, ce sont les ouvriers qui restent grandement majoritaires et stables avec un peu plus de 40 % de la totalité des demandes. Finalement, les plus jeunes restent les plus demandeurs avec plus de la moitié pour les 35-55 ans et un quart pour les 25-35 ans.
Malheureusement, le bilan du Fonds du logement ne présente aucune ventilation plus précise de ces chiffres. Mais l’extension des demandes à des classes de salaires un peu plus élevées est un indicateur préoccupant pour l’accessibilité à un logement décent, d’autant plus que ce dernier facteur à une influence majeure sur le rapprochement ou non du seuil de pauvreté. Heureusement que la hausse des prix sur le marché du logement „n’est pas considérable“.