CONSEIL D’ÉTAT: Haute corruption ?

Les nominations au Conseil d’Etat ont depuis toujours eu une petite odeur de népotisme politique. Avec l’entrée en jeu de candidats issus des Big Four, l’institution est encore plus remise en question.

La quasi-nomination d’Alain Kinsch au Conseil d’Etat n’étonne pas vraiment. Omniprésent depuis les balbutiements de la coalition – il a notamment participé à l’élaboration du programme gouvernemental -, ce n’était qu’une question de temps avant que que le gouvernement ne lui trouve une place dans son appareil politique. Le problème est qu’il est issu d’un des Big Four, Ernst & Young cette fois, et que l’influence de ces sociétés de conseil sur les bleu-rouge-verts commence à devenir un peu trop voyante. Les membres du barreau ne sont pas les seuls à voir d’un mauvais oeil la concurrence des sociétés de conseil, qu’ils accusent de faire leur travail.

Et si un jour PWC proposait de supprimer la Chambre des députés et le gouvernement, et de se confier les affaires, puisque, après tout, il y aurait bien des économies à faire ?

Ainsi, non seulement Kinsch a conseillé le futur gouvernement dans la création de son programme, mais ses collègues de PWC ont aussi fait de même pour le budget dit « paquet du futur ». Et on ne compte plus les audits confiés à une de ces boîtes dans toutes les strates administratives, que ce soit à la police ou à l’Olai. Certes, profiter des services de ces entreprises n’est pas une nouveauté en soi, et les gouvernements précédents étaient déjà assez friands des conseils procurés par les Big Four – bien qu’ils ne se soient pas montrés aussi transparents là-dessus. Mais cela n’empêche que l’influence que ces firmes exercent sur nos représentants démocratiques devient de plus en plus inquiétante. Et si un jour PWC proposait de supprimer la Chambre des députés et le gouvernement, et de se confier les affaires, puisque, après tout, il y aurait bien des économies à faire ?

Et puis, il y a un deuxième hic à ces renouvellements de mandats dans la haute corporation. C’est que rien n’a changé, alors que nombre de promesses avaient été faites. Les Verts en particulier avaient, dans l’ère tellement lointaine où ils peuplaient encore les bancs de l’opposition, souvent revendiqué une réforme du Conseil d’Etat. Et alors qu’ils partagent le pouvoir depuis plus d’un an, on ne les entend plus du tout s’étendre sur ce sujet. Ce silence assourdissant de la realpolitik en dit long sur l’importance accordée au Conseil d’Etat par le gouvernement en charge des affaires.

Car c’est devenu un endroit – un peu comme le Parlement européen – où l’on peut remiser des politiciens devenus gênants, à l’instar de Lucien Lux pour le LSAP, ou alors récompenser des amis proches, comme ce serait le cas avec Alain Kinsch d’Ernst & Young, voire Vafa Moayed Sanandaji, le deuxième de la liste; qui, lui, officie chez Deloitte.

En tout cas, la valeur démocratique du Conseil d’Etat – de par sa représentativité démocratique, ce qui vaut aussi pour les partis qui y sont représentés, certains de l’opposition comme l’ADR demandant depuis longtemps d’y siéger – est discutable.

Et peut-être que le moment n’est plus loin où l’on se demandera à quoi il sert vraiment, et s’il est encore rentable en termes de « return on investment ». D’ailleurs, pourquoi ne pas commander un audit à KPMG pour le constater ?


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