Indemnisations : Des paroles et des actes

Pendant la Seconde Guerre mondiale, la quasi-totalité des Juifs du Luxembourg ont été soit expulsés, soit assassinés. Ceux qui ont survécu ont perdu tout ce qu’ils possédaient, leurs maisons, leurs économies, leurs meubles et jusqu’à leurs souvenirs. La mémoire de la catastrophe qui les avait frappés disparut pendant longtemps – tout comme la volonté de les indemniser.

Après les symboles, enfin du concret : Xavier Bettel signe l’accord sur les indemnisations après des décennies de dénégation de la part des gouvernements luxembourgeois. (Photos : SIP_ME)

Les quelques centaines de Juifs qui ont pu rentrer au Luxembourg après la guerre choisirent de rester discrets, de devenir invisibles si possible. mehr lesen / lire plus

Dans les salles : Rebelles

À première vue, « Rebelles » est l’une de ces comédies trash et grinçantes, peut-être réjouissantes, mais au final plutôt convenues dans leur genre. Le scénario de celle-ci est toutefois construit sur une vision du monde postapocalyptique et débouche sur une morale – si on peut appeler ça ainsi – carrément nihiliste.

Un travail aliénant dans une conserverie qui mène au crime : l’argument de « Rebelles » n’est pas banal. (Photo : E. Seignol/Albertine productions)

Être obligée de rentrer chez sa mère quand, à 35 ans, on a raté sa vie, c’est déjà pas drôle. Mais quand cette mère habite un mobile home dans un camping des alentours de Boulogne-sur-Mer… Sandra doit pourtant s’y résoudre. mehr lesen / lire plus

Adam McKay : L’Amérique de Dick Cheney

Dans son nouveau film, « Vice », Adam McKay prend à partie Dick Cheney. L’ancien vice-président de George W. Bush y est présenté comme un manipulateur cynique, assoiffé de pouvoir – un pamphlet féroce, documenté et rythmé, servi par une distribution impeccable.

Le cowboy-président et son ministre du vice – et l’on croyait encore que le pire aurait pu nous arriver…

Dans « Vice », le double sens du titre annonce la couleur : Dick Cheney, vice-président et président du vice. Pourtant, il partait de loin. Viré de Yale en 1963 pour ivrognerie et manque d’assiduité, Cheney doit retourner au milieu de nulle part dans son Wyoming natal. mehr lesen / lire plus

Antoine Raimbault : Zones d’ombre

Dans son premier film, « Une  intime conviction », Antoine Raimbault revient sur l’affaire Viguier. Servi par d’excellents acteurs, il éclaire avec subtilité les zones grises du système judiciaire. Toutefois, sa tendance à se disperser rend son histoire difficile à comprendre.

Une histoire pas très claire qui risque de broyer des vies entières : « Une intime conviction » est basé sur des faits réels.

Le 27 février 2007, Suzanne Blanch disparaît. Malgré l’absence du corps et de toute preuve, son mari, Jacques Viguier, professeur de droit à l’université de Toulouse, est accusé de l’avoir tuée. Après un premier procès, il est acquitté, mais le parquet fait appel. mehr lesen / lire plus

M. Night Shyamalan : Au-delà du bien et du mauvais

M. Night Shyamalan a mis beaucoup d’ambition dans « Glass ». Ce film était censé donner une cohérence à sa filmographie et revisiter le genre du superhéros. Le résultat est en demi-teinte : un film plus psychologique que spectaculaire, mais desservi par une fin lourdingue qui célèbre la loi du plus fort.

Un peu « Nietzsche pour les nuls » et un peu de baston – c’est tout.

Quelques semaines après les événements dépeints dans « Split », Kevin Wendell Crumb (James MacAvoy) alias « La Horde », le tueur souffrant de trouble dissociatif de l’identité, fait toujours régner la peur sur Philadelphie. mehr lesen / lire plus

Paul Dano : Tu deviendras un homme mon fils

« Wildlife », le premier long métrage de Paul Dano, est un film tout en lenteur et en sensibilité sur le passage à l’âge adulte d’un adolescent de 14 ans. Témoin du délitement de sa famille, il va découvrir les lois implacables de la vie sauvage.

Une tranche de vie, mais aussi un film où l’idée d’émancipation n’explique pas tout. (Photos : outnow.ch)

Jo Brinson, 14 ans, vient de s’installer à Great Falls, Montana, avec ses parents. Sa mère, Jeannette, a quitté un poste d’enseignante à mi-temps pour s’occuper de lui, tandis que son père, Jerry, travaille dans un country club. mehr lesen / lire plus

Hirokazu Kore-eda : Plus fort que Pokémon

Le dernier long métrage d’Hirokazu Kore-eda, Palme d’or du Festival de Cannes 2018, évoque avec subtilité et empathie les laissés-pour-compte d’une société qui se rêve homogène. Au Japon, « Manbiki kazoku » (Shoplifters) a embarrassé le gouvernement mais remporté un énorme succès critique et populaire.

Quand une Palme d’Or embarrasse votre premier ministre, c’est que vous avez fait du bon travail.

Dans la famille Shibata, le papa est un tire-au-flanc, le fils un voleur, la belle-sœur est strip-teaseuse et la maman fait les poches des clients dans la blanchisserie qui l’emploie. La grand-mère héberge tout ce petit monde, qu’elle nourrit avec la pension de retraite de son défunt mari. mehr lesen / lire plus

Benedikt Erlingsson : Après elle, le déluge

« Kona fer í stríð » (Woman at War) raconte l’histoire d’une femme intrépide, qui lutte contre les multinationales de l’aluminium. Ce qui rend ce film islandais particulièrement brillant ? À première vue, il est léger et réjouissant, mais au fond, il s’agit d’un cauchemar.

Halla doit trouver un sens à ses multiples combats – et surtout vaincre le mutisme qui l’entoure.

Dans sa vie de tous les jours, Halla, cinquantenaire célibataire, dirige une chorale. Mais loin des regards, elle mène une guerre solitaire contre les multinationales de l’aluminium. Armée de son arc, elle part à l’assaut des lignes à haute tension qui balafrent les hauts plateaux d’Islande pour alimenter leurs usines voraces en énergie. mehr lesen / lire plus

Nadine Labaki : Kill the Poor

Dans « Capharnaüm », troisième long métrage de Nadine Labaki, la réalisatrice libanaise aborde de front plusieurs thèmes lourds – en particulier l’enfance maltraitée. Le scénario manque toutefois de point de vue, faisant glisser le film sur une pente troublante.

Zain et Jonas, son frère de misère, avec qui il partage une vie tellement dépourvue de sens, que l’eugénisme apparaît comme une solution…

Zain (prononcez : Zè-ne) est un gamin des rues de Beyrouth, débrouillard et fort en gueule. Dans cette chienne de vie qui est la sienne, il essaie de survivre à force de petits boulots et de menus trafics. mehr lesen / lire plus

Travail forcé : Lost Highway


Les premiers tronçons de l’autoroute A48, dans l’Eifel, ont été construits par des hommes réduits en esclavage par les nazis. Beaucoup d’entre eux venaient du Luxembourg. C’est cette histoire que Wolfgang Schmitt-Kölzer raconte dans son dernier livre.

Rien n’est plus banal qu’une autoroute. Elle mène au boulot ou au supermarché, à la maison de campagne ou à l’appartement loué en ligne. Mais lorsque la première d’entre elles fut ouverte au trafic, en 1908 (le Long Island Motor Parkway), les avocats du progrès technique savaient que la voiture allait révolutionner nos sociétés. Certains de ces rêveurs étaient des antihumanistes affirmés, comme les futuristes italiens qui voulaient noyer le vieux monde dans son sang et projetaient leurs fantasmes de vitesse sans limites et de puissance mécanique sur le fétiche autoroute. mehr lesen / lire plus

SACHA BACHIM: Apocalypse elo

Les films de guerre luxembourgeois suscitent toujours l’attention du grand public, et « Heemwéi » n’est donc pas une exception. Pourtant, ce film rompt avec une longue tradition de nanars patriotiques.

« Heemwéi » éclipse l’image du Luxembourgeois héroïque et résistant avec brio.

Encore la Seconde Guerre mondiale et encore l’enrôlement forcé. Les films à cent pour cent luxembourgeois ont beaux être rares, mais cette époque et ce sujet au moins n’auront pas été occultés. Rien que ces dernières années, deux films très oubliables ont été consacrés à l’incontournable figure mémorielle qu’est l’enrôlé de force : « Réfractaires » (2009), mélodrame confus sur fond d’occupation et « Emile » (2010), un nanar patriotique sans sève ni subtilité. mehr lesen / lire plus

BONNES FEUILLES (6/6): Démystifications

Dans cette dernière partie des bonnes feuilles tirées du mémoire de thèse de Vincent Artuso, on évoque les conclusions que l’on peut tirer de l’attitude de la population luxembourgeoise face à l’occupant nazi et comment celles-ci relativisent certains mythes nationaux.

Collaborer ou résister ? Le choix des membres de la compagnie des volontaires était peut-être le plus simple à l’époque, celui des civils connaissait beaucoup plus de nuances.

Tant que le Reich apparut comme le vainqueur vraisemblable de la guerre, à la condition indispensable que leur indépendance soit garantie, une majorité d’entre les Luxembourgeois aurait probablement accepté la collaboration – si l’on entend par là une adaptation des institutions du pays à l’ordre nouveau, accompagnée d’une union politique, économique et culturelle plus étroite avec le Reich. mehr lesen / lire plus

BONNES FEUILLES (5/6): Les SS luxembourgeois

La cinquième partie des bonnes feuilles du mémoire de thèse de Vincent Artuso sur la collaboration évoque un chapitre particulièrement sensible : la présence de Luxembourgeois dans les rangs de la Waffen SS. Contraints ou volontaires, le destin de ces jeunes recrues fait aussi miroiter le déchirement du pays face à l’oppresseur allemand.

Uniformes noires et bon statut social : Les membres de la Vdb exerçaient une fascination malsaine sur beaucoup de jeunes Luxembourgeois

Des Luxembourgeois servirent les autorités d’occupation allemandes en France et en Belgique, d’autres s’engagèrent volontairement dans les forces armées du Reich. L’historien Paul Dostert estime qu’ils furent près de 1.500. mehr lesen / lire plus

BONNES FEUILLES (4/6): La question juive au grand-duché

Dans la quatrième partie des bonnes feuilles du mémoire de thèse de Vincent Artuso, nous évoquons le sort des juifs luxembourgeois et étrangers, ainsi que les agissements des commissions et de la population à leur égard, avant et après l’invasion allemande.

La synagogue de la ville de Luxembourg, photographiée avant sa destruction. (©photothèque de la ville de luxembourg, auteur inconnu)

Selon le rapport récent sur la spoliation des biens « juifs » au Luxembourg, 3.907 personnes se déclarant de confession israélite vivaient au Grand-Duché à la veille de l’invasion. 1.005 étaient de nationalité luxembourgeoise, 2.902 étaient étrangers, soit près des trois quarts. mehr lesen / lire plus

BONNES FEUILLES (3/6): Berlin ne répond pas

Dans cette troisième partie des bonnes feuilles du mémoire de thèse de Vincent Artuso, nous voyons comment les commissions luxembourgeoises s’étaient trompées en voulant troquer collaboration contre souveraineté.

Dernière révérence à la souveraine :
un concert de bienfaisance en
son honneur à la Place d’Armes.

Pour garantir l’avenir du pays et permettre qu’il se réforme en toute indépendance, il importait d’abord à Emile Reuter et Albert Wehrer de faire revenir le Reich sur sa déclaration de guerre. Le 5 juillet 1940, la Commission administrative adressa un mémorandum au gouvernement du Reich, qui rappelait les garanties que ce dernier avait données au Grand-Duché quant au respect de sa neutralité et soulignait les bons rapports qui avaient jusque-là prévalu avec l’administration militaire allemande. mehr lesen / lire plus

BONNES FEUILLES (2/6): Adaptation

Dans la deuxième partie des bonnes feuilles extraites de la thèse de doctorat de Vincent Artuso sur l’histoire de la collaboration, nous nous penchons sur comment les responsables luxembourgeois ont voulu tirer les leçons de la victoire allemande.

Une des conséquences les plus directes de l’invasion allemande : les évacuations de la population – ici dans la ville de Luxembourg. Après cette période de remous, les ressentiments de la population se tassaient petit à petit – commence alors « l’époque sombre » de la collaboration qui n’est pas encore assez étudiée.
PHOTO : ©photothèque de la ville de Luxembourg_auteur Batty Fischer

A la fin de la campagne de France, la situation du Grand-Duché de Luxembourg était des plus défavorable. mehr lesen / lire plus

BONNES FEUILLES (1/6): La naissance d’un contre-gouvernement 

Dans le premier chapitre de son mémoire de thèse, l’historien revient sur la naïveté dangereuse du gouvernement, qui n’avait rien préparé pour le cas de l’invasion. Laissée seule avec les problèmes du pays, la Commission administrative accepta la coopération avec les Allemands.

Avec le début de l’occupation allemande au Luxembourg commença d’abord et surtout une épisode de doutes où rien n’était clair.

A la veille de l’invasion, l’éventualité d’un départ du gouvernement avait à peine été évoquée. Albert Wehrer indique que ce n’est qu’à la fin du mois de janvier 1940 que Joseph Bech, ministre des Affaires étrangères, lui fit savoir, sans plus de précision, qu’en cas d’invasion, le gouvernement envisagerait de se retirer « à la frontière opposée à celle par laquelle l’invasion se ferait et de quitter éventuellement le pays si l’intégralité du territoire était occupée ». mehr lesen / lire plus

HISTOIRE COLONIALE: Au temps béni des colonies

Dans son mémoire de master, qui a reçu le prix de la Fondation Robert Krieps, Régis Moes pose non seulement la question du passé colonial du grand-duché mais aussi celles de son identité et du cheminement de sa mémoire.

Le Congo belge, et aussi luxembourgeois, ne s’est jamais remis de l’effort colonial.

Encourager de jeunes chercheurs, rendre leurs travaux accessibles à un large public en les publiant et en les diffusant à un prix très abordable : voilà ce que fait la Fondation Robert Krieps (FRK) qui, depuis 2009, décerne un prix au meilleur mémoire de master. Le premier lauréat fut Bernard Thomas dont le livre, « Le Luxembourg dans la ligne de mire de la Westforschung », est paru l’année dernière. mehr lesen / lire plus

JAY ROACH: Plus c’est gros, mieux ça passe

Dans « The Campaign », Will Ferrell et Zach Galifianakis s’affrontent sans pitié pour une place au congrès américain. Une comédie déjantée et transgressive qui aborde toutefois de vrais problèmes.

La vacuité de la vie politique américaine prise sous la loupe de la satire.

Cam Brady (Will Ferrell), député démocrate de la quatorzième circonscription de la Caroline du Nord est un animal politique. Armé d’une dentition immaculée et toujours impeccablement coiffé, amateur de gros cigares et d’électrices légères, de slogans bateaux et de phrases toutes faites à propos de Dieu, de la famille ou de la destinée manifeste, il a été réélu à quatre reprises. mehr lesen / lire plus

IDENTITE ET HISTOIRE (3): Le passé a la vie dure

Dans son nouveau livre, l’historien Pit Péporté analyse les représentations du passé médiéval luxembourgeois sur près d’un millénaire. Fidèle à l’approche constructiviste, il attribue un rôle plus pernicieux aux auteurs de l’ère nationale qu’à leurs prédécesseurs. Son approche érudite l’empêche toutefois de tomber dans une grille de lecture dogmatique.

Mélusine, le comte Sigefroid, la comtesse Ermesinde et Jean l’Aveugle. Ces quatre figures historiques et mythiques sont constitutives de la façon dont les historiens racontent l’histoire du Luxembourg.

Le livre de Pit Péporté (« Constructing the Middle Ages. Historiography, Collective Memory and Nation-Building in Luxembourg », Leiden/Boston, Brill, 2011) n’est pas une histoire du Moyen-Âge. mehr lesen / lire plus