Justice internationale : Les règles communes s’appliquent à tout le monde

La Cour pénale internationale est sous la pression d’Israël et des États-Unis, alors que son procureur pourrait émettre des mandats d’arrêt contre de hauts responsables de l’État hébreu, dont Benyamin Netanyahou, pour de possibles crimes de guerre commis à Gaza.

(Photo : Tingey Injury Law Firm/Unsaplash)

La rumeur bruissait depuis des semaines : la Cour pénale internationale (CPI) pourrait émettre des mandats d’arrêt internationaux contre le chef du gouvernement israélien, Benyamin Netanyahou, son ministre de la Défense, Yoav Gallant, et le chef d’état-major de Tsahal, le général Herzi Halevi. Le cours des choses s’est accéléré ce vendredi 3 mai, quand le procureur de la CPI, Karim Khan, a publié un communiqué dans lequel il met en garde « les individus qui menacent » son bureau et ses fonctionnaires. « Toutes les tentatives visant à entraver, à intimider ou à influencer les employés de mon bureau doivent cesser immédiatement. Même sans suite, elles peuvent constituer une infraction contre l’administration de la justice. Le code pénal de la CPI interdit l’intimidation et le trafic d’influence, que ce soit par la contrainte ou la persuasion », a écrit l’ancien avocat britannique, sans citer explicitement ni Israël ni les États-Unis, qui sont à la manœuvre.

La CPI enquête depuis 2021 dans les territoires palestiniens sur de présumés crimes de guerre commis par l’armée israélienne, le Hamas et d’autres groupes palestiniens armés. Après l’agression terroriste dévastatrice perpétrée à l’automne dernier par le mouvement islamiste, la juridiction internationale a étendu son enquête « à l’escalade des hostilités et la violence depuis les attaques du 7 octobre 2023 ». En décembre, Karim Khan s’était rendu dans les villes israéliennes frontalières de Gaza, dont une partie de la population avait été massacrée par le Hamas et le Djihad islamique. Face aux représailles meurtrières de Tsahal pour la population civile de Gaza, où des dizaines de milliers de personnes ont trouvé la mort, le bureau du procureur vise désormais de hauts responsables israéliens. Ils seraient accusés d’avoir « organisé la famine » de la population gazaouie, en entravant l’entrée de l’aide alimentaire dans le territoire.

Si tout accusé·e est présumé·e innocent·e jusqu’à sa condamnation ou sa relaxe, personne ne doit échapper aux règles communes du droit humanitaire international.

(Photo : Justflix/Wiki Commons)

Tant en Israël qu’aux États-Unis, des voix officielles ont violemment dénoncé la possible émission de ces mandats d’arrêt, qualifiée entre autres de « danger pour la démocratie » et désignant la CPI comme « le plus grand complice du terrorisme international ». La porte-parole de la Maison Blanche a estimé que la CPI n’était pas compétente pour enquêter sur l’action de Tsahal à Gaza. Si les États-Unis et Israël ont bien signé le Statut de Rome, qui a présidé à la création de la CPI en 2002, ils ne l’ont jamais ratifié, car ils dénient à la juridiction internationale le droit de juger leurs ressortissant·es.

Né d’un long processus, le Statut de Rome a désormais été ratifié par 124 pays, dont le Luxembourg. À l’image des États-Unis, d’autres puissances comme la Russie ou l’Iran ne l’ont pas ratifié, tandis que d’autres encore, comme la Chine, l’Inde ou l’Arabie saoudite, ne l’ont pas même signé. La CPI, située à La Haye, est dotée de la compétence universelle pour juger les personnes accusées de crime de génocide, de crime contre l’humanité, de crime d’agression et de crime de guerre. Dans ses premières années, elle a exclusivement lancé des mandats d’arrêt contre des Africains, ce qui lui a valu le reproche d’être une juridiction au service de l’Occident. Mais en 2023, elle a émis un mandat d’arrêt contre Vladimir Poutine, après l’invasion russe de l’Ukraine, un tournant dans son histoire.

Si tout accusé·e est présumé·e innocent·e jusqu’à sa condamnation ou sa relaxe, personne ne doit échapper aux règles communes du droit humanitaire international, sur lequel se fondent les poursuites et procès de la CPI. Plus que jamais, c’est de justice qu’a besoin un monde dont le chaos brutal et meurtrier s’abat d’abord sur les civil·es. C’est une question d’humanité.


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