Muchas gracias Shakira !

La chanteuse latina a, par des montages fiscaux, contribué à clarifier l’échange d’informations entre États membres de l’Union européenne.

Shakira n’est pas uniquement une des rares chanteuses pop qui écrit ses propres chansons, sa créativité s’applique aussi dans le domaine de l’optimisation fiscale. (CC BY 2.5 – Andres Arranz)

D’origine colombienne, Shakira Isabel Mebarak Ripoll est résidente en Espagne depuis une bonne décennie. Et dans son pays d’accueil, la chanteuse à la carrière mondiale et aux revenus conséquents grâce à ses tournées et ses droits d’auteure a déjà eu maille à partir avec le fisc. C’est en 2017 que les Paradise Papers exposent les structures de la chanteuse : officiellement domiciliée aux Bahamas, la résidente espagnole a « optimisé » ses impôts sur ses droits d’auteure, notamment en passant par des structures montées au Luxembourg et à Malte.

La justice espagnole se met en branle contre Shakira courant 2018. C’est aussi à ce moment que commence vraiment l’épisode luxembourgeois de l’affaire, qui a moins à voir avec les tours d’acrobatie légaux visant à réduire les impôts à payer par la chanteuse qu’avec l’avenir de l’échange d’informations fiscales. Car l’administration fiscale espagnole s’est adressée déjà en 2017 à sa collègue luxembourgeoise, voulant obtenir plus d’informations sur les sociétés au nom de Shakira au Luxembourg et sur sa banque. Une demande à laquelle l’Administration des contributions directes (ACD) donne suite : son directeur enjoint aux sociétés visées (que nos confrères du Land ont identifiées comme étant ACE Investment Fund, Carpe Diem Corp et ACE Entertainment – toutes inscrites actuellement au registre des bénéficiaires effectifs sous le nom de Shakira) à la banque (Safra-Saraisin – une des banques les plus citées dans les Panama Papers) de « communiquer des informations portant sur des comptes bancaires et sur des actifs financiers dont [Shakira] serait titulaire ou bénéficiaire », comme le communique la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans l’arrêt prononcé ce mardi.

Le problème est que, selon la législation luxembourgeoise, les personnes visées par une telle injonction n’ont aucun moyen de recours. C’est pourquoi les avocat-e-s des sociétés de la chanteuse se sont pourvu-e-s devant le tribunal administratif, qui leur a été favorable pour deux raisons : l’absence de possibilité de recours n’est pas conforme à la charte des droits fondamentaux européenne et les demandes de l’ACD ne seraient pas « vraisemblablement pertinentes ». Le tribunal a donc annulé partiellement les injonctions de celle-ci.

Devant cet imbroglio, l’État luxembourgeois a introduit un appel devant la Cour administrative pour clarifier les choses. Celle-ci a renvoyé l’affaire devant la CJUE. 

Et cette dernière vient finalement de trancher de façon salomonienne : les personnes et sociétés visées par une injonction du fisc doivent avoir le droit à un recours, dans le respect de leurs droits fondamentaux. D’autre part, la CJUE vient d’apporter une clarification à la notion très vague de « vraisemblablement pertinente » en ce qui concerne les motivations des demandes d’informations entre pays européens : il suffit désormais d’indiquer « l’identité de la personne détentrice des informations en cause, celle du contribuable qui est visé par l’enquête à l’origine de la demande d’échange d’informations et la période couverte par cette dernière » ; il faudra aussi que la demande porte sur des « contrats, des facturations et des paiements » liés à l’enquête et au ou à la contribuable visé-e.

Bref, grâce à Shakira, l’échange d’informations a avancé d’un grand pas, avec l’espoir de voir s’amoindrir un jour toute l’industrie de l’« optimisation fiscale ».


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