Reserve Polizei Batallion 101 : De nouvelles preuves

Jeudi dernier a eu lieu une table ronde au Musée national de la Résistance (MNR) à Esch-sur-Alzette, où les nouvelles découvertes concernant les Luxembourgeois impliqués activement dans l’Holocauste ont été rediscutées – avec de nouvelles preuves à l’appui.

La photo publiée en décembre dernier, montrant un Luxembourgeois X avec un fusil d’assaut devant une grange en Pologne. (©coll. privée/MNR)

Très satisfait du déroulement de la soirée, l’historien Jérôme Courtoy, qui avec sa collègue Elisabeth Hoffmann, qui travaillent tous les deux pour le MNR, avaient publié en décembre dans le woxx de nouvelles preuves de crimes de guerre commis par des Luxembourgeois en uniforme allemand, est surtout fier d’une chose : « Les réactions très positives en fin de débat. On s’était attendus à plus de contradiction, d’autant plus qu’il y avait d’anciens gendarmes et des policiers dans la salle – mais finalement le respect devant les historiens a prévalu sur les éternelles querelles. »

Il faut aussi dire que le panel était équilibré : à droite Paul Dostert, l’historien-fonctionnaire d’État qui avait le premier eu pour mission d’enquêter sur les anciens de la « Fräiwellege-Kompanie » sous la bannière du Reserve Polizei Batallion (RPB) 101 en Pologne, à la modération Vincent Artuso, connu pour le rapport du même nom, Benoît Niederkorn, le curateur du Musée d’histoire militaire de Diekirch et finalement Mil Lorang, qui vient de publier « Luxemburg im Schatten der Shoah ». Un livre avec de fascinants nouveaux détails concernant une partie sombre de l’histoire grand-ducale.

Pour mettre dans le bain celles et ceux qui ne connaissent pas le contexte : le RPB 101 est responsable de certains des pires massacres commis contre la population juive en Pologne après le passage de la Wehrmacht. Outre les tueries en masse de civil-e-s, le RBP 101 organisa aussi les « Judenjagden », des traques de Juifs et Juives et de résistant-e-s qui avaient réussi à échapper aux rafles et se cachaient dans les bois et dans les fermes. C’est surtout au cours de ces dernières que les 14 Luxembourgeois du RBP 101 se sont illustrés, comme le montre la photo découverte par Elisabeth Hoffmann et Jérôme Courtoy, publiée en décembre, qui montre un Luxembourgeois avec une « Stoßtrupp » devant une grange, en apparat militaire. On y voit aussi le corps d’une personne à terre – la mention à l’arrière de la photo explique : « Cette grange était pleine de Juifs et de bandits. Le Stoßtrupp après la bataille. »

Des Luxembourgeois au RBP 101, très appréciés par leur hiérarchie.

Concernant cette photo, de nouveaux détails ont fait surface. Jérôme Courtoy a d’abord expliqué qu’il avait pu identifier à cent pour cent un autre Luxembourgeois sur la photo et qu’il suspectait deux autres hommes d’être aussi originaires de la « Fräiwellege-Kompanie ». Cela grâce à des portraits trouvés récemment par Mil Lorang. Et puis l’expert en matière militaire, Benoît Niederkorn, a clairement désigné le Luxembourgeois X, donc celui identifié en premier, comme étant le meneur du groupe – à cause des attributs militaires, uniforme et armes qu’il porte. Il pourrait donc hypothétiquement s’agir ici d’un groupe de combat composé en majorité de Luxembourgeois, sous commandement luxembourgeois de surcroît.

Un autre détail qui a émergé des recherches de Mil Lorang et corroboré par Paul Dostert : les Luxembourgeois étaient très appréciés par leur hiérarchie. Ce qui a une raison précise : les autres membres du RBP étaient de la réserve, donc des civils âgés d’environ 45 ans. Les Luxembourgeois avaient tous entre 20 et 22 ans et avaient une formation militaire. Surtout, ils nourrissaient tous l’ambition de faire carrière dans la police ou la gendarmerie au Luxembourg. Ce qui, pour les survivants, a d’ailleurs été le cas – comme l’illustre le cas de Jean Heinen, membre du RBP 101 et haut gradé de la Sûreté après la guerre. D’ailleurs, comme l’a relevé Dostert, les membres du RBP 101 dans la police bénéficiaient d’un autre avantage. Contrairement à leurs camarades de la « Fräiwellege-Kompanie », qui avaient refusé de prêter serment au Führer et qui sont passés par le camp de Dachau pour cette infamie, leurs années passées à la guerre ont été comptées pour leur retraite.

Il serait intéressant d’éplucher leurs dossiers d’épuration pour voir comment l’État luxembourgeois a pu finir par employer des criminels de guerre dans ses forces de l’ordre. Mais tant que les archives restent toujours aussi difficiles d’accès, les citoyen-ne-s du grand-duché seront privé-e-s, ou épargné-e-s c’est selon, de ce pan de leur histoire.


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