LAÏCITE: Te Deum Non Gaudeamus

Que le Te Deum fasse partie de la tradition luxembourgeoise ou non, l’alliance des athées, humanistes et agnostiques (AHA) veut une fête nationale sans caractère religieux.

Chaque année, c’est le même spectacle dans la cathédrale Notre-Dame de Luxembourg. Pour le Te Deum, les bancs de l’église sont remplis à ras bord de fonctionnaires, de ministres, de députés, de notables locaux et, bien évidemment, de sang bleu. Une sorte de grande communion entre le Tiers Etat, l’aristocratie et la notabilité religieuse, destinée à symboliser l’unité de la nation autour de la sacrosainte trinité : Etat, église et politique? bon, avant tout bien sûr le CSV. Le problème est que malheureusement, au Luxembourg aussi le temps passe et la pertinence de certaines traditions diminue. Car si l’acte officiel du Te Deum est pour certains une chose impensable à altérer, pour d’autres – nous pensons entre autres aux fonctionnaires « forcés » d’y aller par convention et par pression sociale – c’est un réel calvaire de se retrouver sur les bancs durs de la cathédrale suffoquant sous la marée de chapeaux exotiques dont aiment s’affubler les dames des notables.

C’est exactement sur cette pression sociale que l’AHA veut agir. « Nous n’appelons pas à l’abolition du Te Deum », précise Manuel Huss, le secrétaire général d’AHA, « Mais nous préférerions que cet acte ne soit pas un acte officiel de la fête nationale. L’archevêque est totalement libre d’inviter qui il veut au Te Deum. Par contre, cela ne devrait plus être un `must‘ pour tous les officiels qui doivent être présents à une fête nationale ». Comme alternative, l’AHA pourrait s’imaginer un acte officiel dans un endroit plus neutre, comme la Philharmonie ou le grand théâtre de la ville de Luxembourg, où le grand-duc tiendrait un discours solennel.

C’est pourquoi, l’alliance a envoyé une lettre à tous les responsables politiques du pays pour les appeler à boycotter – même si le terme ne tombe pas dans la lettre – le Te Deum. Mais seulement s’ils ne sont pas religieux, cela s’entend. De plus, ils ont envoyé une lettre à ce sujet à la cour grand-ducale, restée sans réponse jusqu’à aujourd’hui.

Reste à savoir si cet appel sera suivi. D’un côté, une fraction des officiels reste à la maison de toute façon pour le Te Deum et de l’autre, la pression sociale qui veut que le tout-Luxembourg se rassemble ce jour ne disparaîtra pas par le biais d’une simple lettre. Car le CSV et l’église ont bien compris que les temps sont durs pour eux et ils essaient par tous les moyens de s’agripper aux traditions. « Le CSV veut faire passer l’abolition du Te Deum en tant que partie intégrante de la fête nationale pour un problème très compliqué à résoudre. Alors que c’est le contraire qui est vrai », constate Taina Bofferding, la vice-présidente de l’alliance.

Mais ce n’est pas le seul domaine où la sainte union entre Etat-CSV et église est en train d’en prendre pour son grade. Ainsi, dans un communiqué de presse publié par l’AHA suite à l’entrevue avec le groupe d’experts envoyés sonder le terrain par le ministre des cultes François Biltgen, afin de déterminer quelles seront les relations entre cultes et Etat dans le futur, on peut lire qu’aussi bien les experts que les membres de l’alliance trouvent le concept des « Maisons de la laïcité » absurde. Alors que Biltgen misait justement sur celles-ci pour pouvoir continuer à faire bénéficier l’église catholique des deniers publics pendant bien des années encore. De plus, le fait que la « Kierchefabrik » du Cents ait vendu un terrain au promoteur Flavio Becca pour plus de trois millions d’euros, mais ne songe toujours pas à rembourser ses déficits des années passées – bien qu’elle n’y soit nullement obligée, car protégée par une loi datant de 1809, cela irait tout de même dans le bon sens – ne devrait pas forcément contribuer à une hausse de la popularité du clergé. Surtout face à une population qui se demande de plus en plus pourquoi elle devrait encore soutenir ce système vétuste.


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