Le dialogue social est en miettes, la croissance est morne, le chômage monte, le prix du logement repart à la hausse et les sondages d’opinion sont à la baisse : ce début d’été est orageux pour Luc Frieden, 18 mois après sa nomination au poste de premier ministre.
L’été commence mal pour Luc Frieden. (Photo : Chambre des députés)
En affirmant à diverses reprises ces derniers mois que les Luxembourgeois·es ne descendent pas dans la rue, Luc Frieden s’est avéré un piètre oracle. Ce 28 juin, l’OGBL et le LCGB ont réuni 25.000 personnes dans la capitale, selon leurs chiffres, signant l’une des plus importantes manifestations de ces dernières décennies (lire page 5). Les besaces syndicales sont pleines de griefs vis-à-vis du gouvernement, accusé de dynamiter le modèle social luxembourgeois sur le droit du travail et les pensions.
Plus les motifs de fâcheries s’accumulent, moins les deux premiers syndicats du privé ont le sentiment d’être entendus. Au point d’opérer un rapprochement inédit dans l’histoire syndicale du pays. En mai dernier, ils ont rompu le fil du dialogue avec le gouvernement après le discours sur l’état de la nation du premier ministre CSV. Luc Frieden a beau répéter son attachement au dialogue social, pour l’OGBL et le LCGB, ce sont des mots creux, sans volonté réelle de discuter. Une analyse partagée par la CGFP, le grand syndicat de la fonction publique. Ce 28 juin, il n’était qu’à voir les panneaux brandis par les manifestant·es et leurs slogans pour constater que Luc Frieden concentre personnellement toute l’aigreur des opposant·es à la politique sociale du gouvernement.
Mais ce n’est pas le seul front sur lequel le CEO encaisse un sérieux revers. Sur le plan économique, le Statec a, ces derniers jours, douché l’espoir d’une reprise économique vigoureuse, telle que promise par l’accord de coalition.
Il n’était qu’à voir les panneaux brandis par les manifestant·es et leurs slogans pour constater que Luc Frieden concentre personnellement toute l’aigreur des opposant·es à la politique sociale du gouvernement.
La croissance du PIB accuse un recul de 1 % au premier trimestre 2025, et elle ne devrait pas dépasser les 0,3 % sur l’ensemble de l’année, prédit l’institut statistique. Sur le front de l’emploi, le chômage repart légèrement à la hausse, à 6 % de la population active, contre 5,8 % un an plus tôt. La création d’emplois suit la même courbe inquiétante, avec une minuscule progression de 0,2 % au premier trimestre, niveau historiquement bas depuis 15 ans (hors période covid). Ces résultats doivent avant tout à un contexte international frappé d’incertitude et d’instabilité, relève le Statec. Il n’empêche : c’est ballot, car Luc Frieden avait tout misé sur une croissance soutenue et créatrice d’emplois pour garantir la réussite de son programme. L’oracle a encore manqué de vision.
Ça ne va pas très fort non plus du côté du logement, décrété grande cause nationale au lendemain des législatives d’octobre 2023. Les prix de vente repartent à la hausse au deuxième trimestre, jusqu’à 6,8 % pour les appartements neufs et des prix au mètre carré dépassant 10.000 euros. Itou pour les loyers, qui grimpent de 8 %, selon les biens. Les cadeaux fiscaux, les subventions et autres abaissements de normes environnementales n’y ont rien changé. La crise persiste, et le coût du logement demeure l’un des principaux facteurs de pauvreté dans le pays.
Tout cela influe forcément sur la popularité du capitaine. Luc Frieden perd 10 points au dernier Politmonitor, publié mi-juin par Ilres pour RTL et le Wort. Il est rétrogradé de la quatrième à la huitième place dans le « Top 10 » des personnalités politiques préférées des Luxembourgeois·es. À ce jeu, Xavier Bettel caracole toujours en tête, gagnant encore deux points. Comme si tout cela ne concernait pas l’ancien premier ministre libéral et désormais numéro deux du gouvernement. De l’art de slalomer entre les gouttes… et de passer un meilleur été que son n+1.
