Le woxx a évoqué plusieurs fois déjà les problèmes du primo-accueil au Luxembourg, où des demandes d’asile et de protection internationale ne pourraient pas être déposées. L’association Passerell a décidé de faire trancher la justice.
En septembre, ils se regardaient en chiens de faïence, les activistes du Lëtzebuerger Flüchtlingsrot (dont Passerell fait partie) et la Direction de l’immigration. Du point de vue de la société civile, les pratiques des autorités dépassaient les limites. Décourager des personnes vulnérables de poser leurs demandes d’asile et de protection internationale serait contraire aux droits humains et aux conventions que le Luxembourg a ratifiées et qu’il arbore fièrement. Ajoutons que la Direction de l’immigration a démenti ces pratiques face au woxx.
C’est la réponse à une question parlementaire posée par le député Déi Lénk David Wagner qui se trouve au centre de la démarche judiciaire. Le parlementaire avait voulu savoir comment une telle différence de perception était possible. Le ministre Asselborn reste sur sa ligne rhétorique : non, les agent-e-s de la Direction de l’immigration ne refusent pas d’enregistrer les demandes, même pas celles des cas les plus désespérés. Par contre, Asselborn a préféré formuler l’attitude de ses fonctionnaires comme suit : « Afin de ne pas donner de faux espoirs à ces personnes, il importe de leur fournir dès que possible ces informations. Il s’avère dans la pratique qu’une fois informées, de nombreuses personnes décident de ne pas introduire une demande (…). »
Information ou découragement?
Or, ces informations peuvent bel et bien avoir un effet de découragement. Et Passerell dispose de nombreux témoignages de personnes vulnérables, familles avec enfants inclus, qui disent ne pas avoir pu enregistrer leurs demandes ou avoir été menacées de transfert immédiat s’ils ou elles la déposaient – dans le cas de réfugié-e-s qui tombent sous les inanités du règlement de Dublin III. Règlement qui, d’ailleurs, n’interdit pas le réexamen d’une demande dans un deuxième pays, si la première demande a été posée dans un État membre, comme la Grèce ou l’Italie, qui ne peut pas garantir la sécurité des personnes qui demandent une protection. Les pratiques luxembourgeoises aboutiraient donc à des situations intenables dans lesquelles Passerell a dû intervenir in extremis pour éviter que des familles avec enfants finissent à la rue en plein confinement.
Devant des positions aussi durcies, Passerell a donc choisi cette « initiative inhabituelle » et mène une action « préparée et portée par les juristes bénévoles de l’association ». Même si l’association se dit consciente que la « législation luxembourgeoise est actuellement peu favorable au droit d’agir en justice des associations » et craint des « questions de recevabilité » –elle dit ne pas avoir le choix. Ce sera donc au tribunal administratif d’apprécier si oui ou non, ces « informations » sont des découragements et trahissent une attitude peu avouable de la Direction de l’immigration et de ses responsables politiques.