Le projet de théâtre documentaire « Traverses » de la metteuse en scène Leyla Rabih thématise le parcours géographique et émotionnel de personnes exilées depuis la Syrie.
Depuis mars 2011, la guerre civile secoue la Syrie. Dès le début, Leyla Rabih, metteuse en scène franco-syrienne, rencontre des réfugié-e-s du pays déchiré par les conflits armés. Un échange qu‘elle a inclus entre autres dans le projet de théâtre documentaire « Traverses » à Neimënster, les 27 et 28 mai.
Le projet a débuté en 2018 : Rabih a été lauréate du programme « Résidence sur mesure » de l’Institut français. Dans ce cadre, elle a séjourné à Beyrouth pour y mener des recherches sur les migrations récentes du peuple syrien. Des voyages en France, en Grèce, au Liban et au Luxembourg ont suivi. Lors des rencontres avec les personnes exilées de Syrie, Rabih a réuni des témoignages, des récits, mais aussi les parcours de ses interlocutrices et interlocuteurs. Ainsi, la metteuse en scène a créé une pièce mêlant théâtre, documentaire et performance.
Cette multidisciplinarité est le reflet de la complexité des questions abordées par Rabih : la pièce discute aussi bien l’impact de la migration sur la personnalité des exilé-e-s que son effet sur le développement de la Syrie. « Le parcours de certaines personnes (…) rappelle [à Leyla Rabih] ses cours d’histoire, de la propagation d’idées nouvelles parmi les populations à l’émancipation de la femme, amenée à assumer de nouvelles fonctions dans la société, au sortir de la Première Guerre mondiale », est-il écrit dans le communiqué de presse sur le projet. « Rabih y voit un parallèle : au-delà du désastre pour les populations, la situation en Syrie peut aussi receler pour les individus des moments d’émancipation très forts. »
Ce n’est pas la première fois que Rabih raconte la migration des Syrien-ne-s sur scène. Un de ses premiers projets sur ce sujet date de 2013. Avec sa compagnie de théâtre « Grenier Neuf », elle a présenté le spectacle « Lettres syriennes/lettres d’exil – Fragments et souvenirs » au Domaine d’O à Montpellier dans le cadre de la manifestation « Les Idéales ». Sur le site web du Domaine d’O, Rabih explique le concept du spectacle : « tisser avec ma propre expérience les textes qui me fondent, malgré la distance et l’absence, depuis l’Europe, cet endroit très privilégié où je me trouve ».
En 2017, Rabih est montée sur scène elle-même, comme traductrice, narratrice et témoin à la maison de la culture de Seine-Saint-Denis à Bobigny : « Chroniques d’une révolution orpheline » était un triptyque littéraire, basé sur des textes du dramaturge syrien Mohammad Al Attar. La pièce se concentre avant tout sur les premiers temps de la révolution syrienne.
Au Luxembourg, Rabih laisse la place aux autres : les exilé-e-s qu’elle a rencontré-e-s lors de ses voyages, les parcours de celles et ceux qui ont partagé leurs histoires avec elle. Comme le fait entendre le communiqué de presse de Neimënster : « L’attention et l’écoute sont au cœur de la scénographie. » Au cours de deux résidences sur le site de Neimënster en 2020, Rabih a testé deux versions théâtrales auprès du public – les réactions ont été intégrées dans l’élaboration de la version finale de la pièce, qui est donc à découvrir la semaine prochaine.