ÉGLISE VS ÉTAT: Le divorce ?

Face aux annonces de la coalition quant à l’évolution des relations entre les communautés religieuses et l’Etat ce lundi, l’église catholique a montré la réaction allergique qu’on attendait.

On aurait pu croire au discours d’un syndicaliste : « Les coalitionnaires n’ont pas cherché le dialogue avec les principaux interessés. Ils ont créé des faits accomplis », a déclaré tout ému devant la presse le vicaire général Erny Gillen. Sa réaction est pourtant aussi prématurée qu’erronée. Les déclarations sur l’enseignement religieux à l’école primaire et au lycée, tout comme celles sur le Te Deum et sur la nécessaire réévaluation du financement des communautés religieuses ne sont pas encore gravées dans le marbre – on en saura plus la semaine prochaine avec l’accord de coalition. Mais cette attitude vexée traduit, une fois de plus, la peur de tout changement de l’église catholique – en ce qui concerne son influence et ses finances. Pourquoi donc a-t-elle créé à la va-vite un « conseil des cultes conventionnés », si ce n’est pour peser un maximum sur les décisions du prochain gouvernement les concernant et défendre coûte que coûte des privilèges ? Des privilèges qui ont même été mis en doute par le fameux rapport d’experts sur « L’évolution future des relations entre les pouvoirs publics et les communautés religieuses ou philosophiques » – commandé encore par l’ex-ministre Biltgen, notamment en ce qui concernait les fabriques d’église et leurs avantages, un thème curieusement absent au point presse des coalitionnaires d’ailleurs.

L’argument démocratique ne tient pas la route.

Au lieu de se lamenter, Gillen aurait juste dû lire les programmes des trois partis du nouveau gouvernement. Mais en tant qu’homme d’église, il semble toujours avoir des problèmes avec des principes comme la démocratie. Sinon, il n’aurait pas mis en doute la légitimité de la nouvelle coalition, invoquant des arguments que même le CSV n’utilise plus publiquement depuis quelques semaines. Mais la précision ne semble plus de mise quand il s’agit de défendre ses privilèges. Car Gillen comme l’association des enseignants de religion (Alerf) avancent un argument très douteux dans leur réquisitoire : celle d’un sondage dans lequel la majorité des parents d’élèves préféreraient avoir le choix entre catéchisme et morale laïque. Or, ce sondage commandé par l’église à TNS-Ilres date de juillet 2008 et à l’époque déjà, il avait été critiqué, notamment dans le woxx (voir woxx 978), comme particulièrement tendancieux. Ainsi, la question posée était de savoir si les parents d’élèves étaient contents d’avoir un choix entre les deux options et non pas sur leur préférence. Et si dans le primaire une petite majorité se disait encline au catéchisme, ce n’était plus le cas pour le secondaire. Aussi, les raisons données par les parents qui avaient inscrit leurs enfants au catéchisme auraient dû faire réfléchir l’église : une grande majorité indiquait le faire plutôt par tradition et habitude que par vraie foi catholique.

En tout cas, si l’église persiste dans son opposition pure et dure, elle a beaucoup à perdre. Que les choses allaient bouger, elle aurait pu le savoir déjà avant les élections, quand même le CSV s’était dit prêt à supprimer les cours de religion dans le secondaire. La bataille pour une nouvelle laïcité est pourtant loin d’être gagnée. Comme on a pu le voir cette semaine, les associations pro-laïcité, (AHA, Libco, Maison de la laïcité et l’association des enseignants de philosophie et de morale (Alpe)) sont loin d’être sur la même longueur d’ondes. De la définition des grandes lignes de cette nouvelle éducation aux valeurs au sort réservé aux catéchètes en exercice, tels seront les défis des prochaines années. Et si l’église catholique veut encore avoir son mot à dire, elle ferait mieux d’être prête à descendre de son trône.


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