« China Power Station III », visible au Mudam jusqu’au 15 septembre, dévoile une autre facette du kaléidoscope chinois : celle des artistes contemporains qui s’intéressent à leurs origines.
Même si leur contenu frôle de temps en temps la critique ouverte à l’égard du régime politique chinois, le fait que les oeuvres de l’exposition seront visibles à Pékin après leurs escales anglaise, norvégienne et luxembourgeoise prouve qu’il ne s’agit pas d’un assemblage d’artistes dissident-e-s. Mais cela ne devrait pas réduire l’intérêt que mérite cette exposition exceptionnelle à plus d’un titre.
Son existence même prouve qu’en tant qu’artiste contemporain en Chine on peut survivre et même que des choses assez étonnantes s’y font. Les jeunes artistes se sont emparés des moyens technologiques qu’utilisent leurs confrères occidentaux, mais pour les utiliser à leur façon et en racontant une autre histoire. L’identité chinoise est au centre de la plupart des oeuvres de « China Power Station III ». Cette nouvelle découverte de l’identité est d’autant plus frappante que la génération antérieure s’est surtout appliquée à la faire disparaître de leurs oeuvres, à nier la culture chinoise qu’ils assimilaient surtout à la censure et à l’ignorance du régime communiste. Celle-ci n’a pourtant pas disparue – comme en témoignent les traitements subis par des journalistes du monde entier lors des J.O. de Pékin – mais il semble que d’un côté le régime ait compris que l’art contemporain pourrait avoir une double valeur pécuniaire et représentative en Occident et que de l’autre, le désir des artistes contemporains de s’intéresser à leurs origines ait pris le dessus.
Un des meilleurs exemples de cette nouvelle « impertinence » est l’installation « 18 Days » de Xu Chen. L’artiste y relate – en exposant une vidéo, des photos agrandies et un véhicule 4×4 qu’il a utilisé pour son oeuvre – son périple aux frontières chinoises. L’idée, non dénuée d’humour noir, était d‘ « envahir » les pays voisins de la Chine en les attaquant avec des chars, avions et cuirassés en plastique. Ces armées télécommandées n’eurent pas le succès escompté : en fin de compte, Xu Chen, n’a réussi qu’à leur faire passer la frontière du Myanmar, ce qui rend encore plus dérisoire son oeuvre. Mais, au lieu d’occulter ces échecs, l’artiste les introduit dans sa vidéo où il persifle la propagande gouvernementale.
D’autres artistes se servent de moyens plus traditionnels pour faire passer leur message. Ainsi, « Rope Coil » de Xue Tao présente des cordes emmêlées, mais faites de papier à journal. L’oeuvre en soi n’est pas spectaculaire, mais si on pense au temps que l’artiste a du investir pour assembler ces cordes, une autre image apparaît. Celle des longs et durs labeurs de la Chine éternelle. A travers le recours à un support d’actualité – le papier journal – l’oeuvre conjugue passé et présent d’une manière on ne peut plus claire. Dur labeur aussi pour Liu Wei. Son installation « Love It, Bite It » est consacrée à l’architecture et à l’urbanisation. Pour faire ressortir les contrastes entre la grandeur et les petites gens, l’artiste s’est résolu à reconstruire des bâtiments mondialement connus, comme le Tower de Londres ou la place Tiananmen de Pékin, en peau de boeuf, matériel appartenant au quotidien de millions de Chinois. La peau de boeuf n’est pas stable : elle retrécit et se dilate selon les températures, ce qui confère à l’assemblage de prouesses architecturales un flair d’instabilité et de ridicule. L’architecture et la totale démesure avec laquelle s’agrandissent les mégalopoles chinoises sont aussi au centre de la vidéo de Hu Xiangqian. « Trend Blindy » montre des maquettes d’immeubles en polystyrène qui flottent devant une vraie skyline. L’effet est direct : on confond de temps en temps immeuble et maquette. Pourtant, la longueur de la vidéo la rend aussi un peu ennuyeuse.
Celles et ceux qui sont avides d’histoires trouveront leur compte dans les travaux de Cao Fei. « I. Mirror : A Second Life City » est bien plus qu’une simple installation vidéo. Dans une énorme caisse pourvue de miroirs de tous les côtés, l’artiste projette ses propres aventures dans les espaces virtuellement infinis de Second Life, plate-forme bien réelle où chaque utilisateur peut se créer un avatar et vivre une seconde vie. Second Life a aussi été instrumentalisé à des fins politiques : on se rappelle l’été dernier où les nouvelles d’ouvertures officielles d’ambassades virtuelles ou de manifestations anti-faschistes sur la plate-forme américaine étonnaient encore. Mais que ce soit une artiste chinoise qui soit l’utilise pour une oeuvre à caractère artistique en dit long sur l’étonnant chemin parcouru par les artistes chinois en un laps de temps relativement court : Ils sont arrivés parmi nous.
China Power Station III, au Mudam, encore jusqu’au 15 septembre.
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