ETAT DE LA NATION: Qualité d’abord

Le gouvernement vient de dépasser son mid-term. Le moment d’émettre de réelles propositions d’avenir est donc venu.

Cela fait deux ans que Jean-Claude Juncker nous a confronté-e-s, lors du débat sur l’état de la nation à l’idée d’un Luxembourg à 700.000 habitant-e-s. Depuis, beaucoup d’encre a coulé, de nombreuses discussions ont eu lieu et les fronts des „pour“ et
des „contre“ se sont mis en place.

A l’époque on aurait pu estimer que le Premier ministre voulait se donner l’image d’un homme d’Etat qui a réussi à dépasser la politique quotidienne pour se lancer dans un débat sur une vision à long terme. Rapidement on a cependant eu l’impression que la
perspective d’un doublement de la population en quelques dizaines d’années était surtout utilisée pour réagir à des revendications peu commodes auxquelles le gouvernement se voyait confronté, notamment au niveau des retraites dans le secteur privé.

Le résultat de cette stratégie était visible ce 1er mai lors de la manifestation du NGL: sous le slogan „700.000 habitants – NON!“, les militant-e-s du syndicat qui se veut neutre ont fait front contre une politique qui leur paraît aller à l’encontre des
intérêts des „petites gens“. Sans vouloir faire l’amalgame avec ce qui est arrivé en France, on peut constater que chaque fois que la droite a recours à des arguments qui font peur, elle réussit à favoriser des courants politiques qui savent très bien
exploiter le sentiment d’impuissance qui s’empare de la population.

Le vrai débat sur les 700.000 habitant-e-s ne concerne pas notre système des retraites. Si un jour l’argent ne suffit plus, il faudra certes inventer un autre mode de financement et éventuellement revoir certains automatismes afin de réduire la facture.
Le nombre d’habitant-e-s que le Luxembourg devra (pourra?) compter un jour est lié à bien d’autres facteurs qui ne sont d’ailleurs pas nécessairement contraignants. Ils pourraient au contraire faire l’objet d’un choix délibéré.

Vu sa situation économique extraordinaire dans un contexte européen beaucoup plus morose, le Grand-Duché est actuellement un pôle d’attraction économique. Conséquence: la main d’oeuvre afflue depuis les régions frontalières et même au-délà. On peut soit
freiner, soit accélérer ces flux. Mais qu’on choisisse l’une ou l’autre option, il faut prendre en compte les „dégâts collatéraux“.

Or, il semble bien que l’actuel gouvernement ait des problèmes à prendre une décision dans l’une ou l’autre direction. Il peine aussi à mettre en place les structures administratives et les instances de discussion nécessaires pour préparer un avenir
moins noir que d’aucuns ne le dessinent. La seule politique à ne pas suivre est celle de ne rien faire ou de limiter les interventions à de petites réparations à chaque fois que le moteur cale.

En automne, la communauté internationale se réunira à Johannesburg pour faire le bilan du „développement durable“, dix ans après la conférence de Rio. Pour l’instant, nous ne connaissons pas encore le contenu du rapport qu’entend remettre le Luxembourg à
cette occasion.

Mais, comme l’a remarqué le Mouvement écologique lors d’une récente conférence de presse, une chose paraît claire: le Luxembourg n’est toujours pas à même de fixer des critères qualitatifs permettant d’évaluer son développement en termes de durabilité.
Or, Rio introduisait pour la première fois la primauté du qualitatif sur le quantitatif.

Parler de 700.000 habitant-e-s sans mentionner dans quel contexte économique, social et surtout écologique une telle perspective devrait se situer n’est pas seulement réducteur. On risque carrément de rater le vrai débat.


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