Malgré des efforts timides, la politique en matière de drogues du gouvernement manque de punch – un état de choses que celui-ci essaie de compenser en misant sur plus de répression, une idée aussi simple que stupide.
Si même Vera la Rouge s’y met, l’heure doit être grave. Certes, ses déclarations revendiquant une présence policière accrue dans sa ville d’Esch-sur-Alzette peuvent aussi être vues comme des manœuvres politiques, voire préélectorales, mais il n’y a pas que ça. Car il se trouve qu’elle n’est pas la seule socialiste à faire dans le « Law & Order ». Ainsi, le député LSAP Franz Fayot en est déjà à sa deuxième question parlementaire dans laquelle il interpelle son ministre Étienne Schneider sur la criminalité liée aux stupéfiants dans le quartier Gare de la capitale. Évoquant le « ras-le-bol » de la population – ou plutôt s’appuyant dessus -, Fayot presse entre les lignes le ministre de la force publique d’employer les grands moyens pour enfin débarrasser le quartier de ses miséreux junkies et de leurs revendeurs.
Certes, un quartier marqué par le trafic et la consommation de drogues dures n’est pas beau à voir, ni à vivre. Et le « ras-le-bol » des habitants est plus que compréhensible. Pourtant, une politique responsable ne doit pas tomber dans le panneau de la répression aveugle. Car celle-ci ne mène strictement à rien. Le commerce de la came est une hydre vengeresse : plus vous coupez des têtes, plus elles repoussent, avec encore plus de vigueur et de détermination. À court et à long terme, les actions policières accrues dans le quartier Gare ne feront qu’accroître la misère et le désarroi – en fragilisant les consommateurs et en forçant les dealers criminels à s’adapter à un environnement devenu plus hostile. Pour le feuilleton journalistique, ce ne sera que partie remise, jusqu’au prochain trou estival ou toute autre occasion de ressortir les vieilles casseroles.
On croirait donc presque assister à une « vallsification » de nos socialos à nous : dans l’Hexagone aussi, un gouvernement dit de gauche a découvert les bienfaits médiatiques de la répression brutale et des états d’urgence.
On croirait donc presque assister à une « vallsification » de nos socialos à nous.
Alors qu’une politique en matière de drogues responsable n’aiderait pas uniquement les toxicomanes à se sortir de leur cauchemar, mais soulagerait aussi durablement les quartiers sensibles du pays. Dans ce contexte, la non-mention de la salle de shoot qui devrait enfin ouvrir ses portes dans la « métropole du Sud » en dit long. Aussi long que l’absence d’avancées réelles vers un vrai changement de cap dans la façon dont l’État veut aborder la problématique de la drogue. Car le « plan national drogues », s’il contient des avancées hésitantes, n’est pas d’une grande originalité. Non, il ne fait que transposer des éléments que certains de nos voisins plus hardis pratiquent avec succès depuis des années – comme les programmes de distribution d’héroïne ou encore la possibilité de faire tester certaines substances lors de grandes fêtes ou festivals.
Une problématique complexe certes, et à laquelle on ne peut opposer des solutions simples. Pire encore : il n’y a pas de remède miracle contre les fléaux de l’addiction. Mais en la laissant croupir dans les coins aveugles de l’illégalité, en criminalisant aussi bien les consommateurs que les revendeurs, on n’aide personne. Et faire croire que la nouvelle vague de répression changerait la donne est à la fois hypocrite et signe de capitulation politique. Vu qu’on ne trouve pas le courage de chercher des voies innovantes et osées, on leur en met plein sur le gnon à ces asociaux, pour que la galerie s’amuse. Un bien triste spectacle.