Le projet Esch 2022 démarre mal. Même pas un mois après la décision de faire de la ville la capitale européenne de la culture, l’équipe de coordination se retrouve sur la sellette.
Chaque année culturelle – du moins au grand-duché – a été plus ou moins exposée au risque d’une politisation et les polémiques qui précédèrent les éditions de 1995 et de 2007 sont désormais des classiques dans les annales de l’histoire de la politique culturelle luxembourgeoise. Pourtant, rarement on aura déchanté aussi vite qu’avec Esch 2022. Même pas un mois après que le jury européen approuve le projet concocté par Andreas Wagner et Janina Strötgen – qui, rappelons-le, avaient sauvé la mise en retravaillant et en restructurant le projet initial retoqué par le même jury – le projet de la capitale européenne de la culture se retrouve dans des eaux troubles.
Comme l’a révélé aujourd’hui le Tageblatt, c’est justement l’équipe de coordination qui dans un an de travail avait réussie à braver les doutes de presque toutes les instances, et notamment un ministère de la Culture réticent, et à créer un réseau, des contacts et un concept, qui se retrouve sur la sellette. Leurs contrats de travails déterminés, qui prennent fin en décembre, ne seront renouvelés que pour six mois par après. La raison en serait une certaine méfiance des responsables politiques communaux envers le duo Wagner et Strötgen – réputés comme n’étant pas encartés. D’autant plus qu’une source proche du dossier nous a confirmée que l’obligation de renouveler le mandat des coordinateurs après l’obtention de l’approbation par le jury européen, ne serait pas issue d’une pression de ce dernier, mais aurait été mise en place sur une demande expresse du ministère de la Culture. Toujours selon l’hebdomadaire eschois, la nouvelle équipe communale (avant tout le bourgmestre CSV Georges Mischo et l’échevin portant la culture dans ses attributions Pim Knaff) mais aussi des édiles des communes voisines ainsi que le ministère lui-même désiraient être plus impliqués et aimeraient bien se faire une idée du projet et des budgets accordés.
Ce faisant, ils admettent donc aussi n’avoir jamais lu le fameux « Bid Book », qui ne détaille pas uniquement la stratégie culturelle, mais donne aussi un aperçu sur les budgets à prévoir et leur utilisation. Difficile donc de faire plus transparent. Ce qui laisse planer un doute quant aux intentions réelles de la classe politique, qui était tout sauf unanimement solidaire avec Esch 2022 tant que les bouteilles de champagne n’avaient pas été ouvertes le 10 novembre dernier. Seraient-ils en train de vouloir s’attribuer un succès qui n’est pas le leur ?
Des signes étaient déjà perceptibles avant même l’attribution du jury. Une anecdote racontée dans les couloirs est – si elle est vraie – assez confondante. Ainsi, lors de la visite du jury en amont de la cérémonie au ministère de la Culture, ce dernier n’aurait pas pu visiter le hall des Soufflantes à Esch-Belval, pourtant déjà un point central de l’année culturelle 2007 avec l’exposition « All We Need ». La raison ? Le ministère aurait égaré les clefs. D’autres mauvaises langues prétendent qu’un promoteur aurait jeté son dévolu sur le terrain et le ministre et son secrétaire d’État n’auraient pas voulu montrer au jury un bâtiment qui de toute façon ne serait plus là en 2022. Même si l’information n’était pas à cent pour cent correcte, cela montre la façon, surtout du DP, de penser la « chose culturelle »… En tout cas, la prochaine réunion du comité de l’asbl Esch 2022, qui aura lieu le 12 décembre, risque d’être chaude.