L’exposition « Drama and Tenderness » en cours au Musée national d’histoire et d’art (MNHA) mélange grands maîtres et inconnus du baroque européen pour mieux montrer les parallèles artistiques déjà existants à l’époque.
Art de la Contre-Réforme catholique, qui sonnait le glas de la bouffée d’air frais apportée par la Renaissance, le baroque était la forme d’expression chérie de la papauté et des monarchies absolues. Mettant en avant la forme plutôt que le contenu, toute expression artistique baroque privilégie l’évasion à la contemplation. C’est donc aussi le produit d’une époque profondément réactionnaire et de restauration des privilèges d’un catholicisme mis en question par l’avènement du protestantisme. L’apparition de ce dernier coïncidant avec le début de la période baroque – vers le milieu du 16e siècle.
Ce qui pour un spectateur contemporain est vite synonyme de faste, voire de kitsch, était à l’époque un terrain de jeu restreint sur le point des idées : on attendra le 18e siècle, qui marque aussi la fin du baroque, pour parler d’un siècle des Lumières. À l’époque donc, cet art constituait une machine de propagande catholique et les mécènes étaient souvent des hommes d’Église.
Ce qui miroite aussi dans les thèmes des tableaux qu’on peut admirer au troisième étage du MNHA. À quelques exceptions près, les motifs sont tous issus des Écritures saintes, allant même jusqu’à en répéter certains gestes. Comme les portraits de François d’Assise (une fois sur toile et une fois en sculpture) qui montrent le pieux saint en train de contempler le Christ de face – le spectateur le voyant donc de dos – tout en exhibant ses stigmates sur les mains au public. Cela illustre aussi une certaine interprétation du saint des pauvres, amoureux de la nature, ici réduit au rôle d’un imitateur du Christ.
D’autres tableaux reprennent les techniques issues du maniérisme italien. L’accent est mis sur les détails, mais pas dans le sens des maîtres flamands et de leurs larges panoramas. Non, les tableaux excèdent très rarement la représentation de deux ou trois personnes, mais tous leurs gestes sont emplis de symboles. Comme le montre la toile d’un maître napolitain inconnu montrant « L’adoration des bergers ». On y voit les trois bergers et la Sainte Vierge tenant l’Enfant Jésus sur ses genoux. Leurs postures sont tout sauf naturelles, même contorsionnistes si on imagine les imiter dans la vie réelle. La façon dont Marie étire le drap pour mieux montrer le divin enfant rappelle plus une pose théâtrale qu’une révélation du Sauveur. Typiquement pour la période, le clair-obscur est très travaillé, mais là aussi pas de façon à donner une teinte de réalisme à l’œuvre. La lumière présente dans ce tableau est cependant bien censée représenter la présence divine. Il en va de même pour beaucoup de tableaux issus des écoles italiennes et espagnoles.
En même temps, le seul « vrai maître » connu de cette époque, Pierre Paul Rubens, a lui aussi travaillé la lumière de façon idéologique. On le voit le mieux dans le tableau utilisé pour l’affiche de l’exposition : « L’éducation de Marie ». L’obsession des corps charnus et gras si propre à Rubens est bien visible déjà, mais si la jeune Vierge n’est pas au centre du tableau (où se trouve un livre, la Bible probablement), la source de lumière provient des deux angelots qui se trouvent au-dessus de sa tête et qui l’illuminent en même temps qu’ils jettent de l’ombre sur ses parents. Le tout bien sûr en vêtements d’époque du 17e siècle, on n’est pas à un anachronisme près.
Si l’intérêt pour le baroque peut aujourd’hui sembler moindre que pour les périodes qui l’ont précédé ou suivi, cela ne veut pas dire que se replonger dans cette époque avec le contexte historique en tête ne pourrait pas avoir un effet éducatif. D’autant plus que certaines toiles sont vraiment extraordinaires de par leur finition technique, et rares à voir – une grande partie sont des emprunts au Musée royal des beaux-arts d’Anvers (en rénovation en ce moment, il est vrai) et à des collectionneurs privés. Alors, si vous avez la nausée de notre époque, pourquoi ne pas se replonger dans le baroque ?
Au MNHA, jusqu’à ce que le Musée royal des beaux-arts d’Anvers rouvre ses portes en 2019.
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