Sans éclat, mais aussi sans enthousiasme, la Chambre a adopté le texte qui doit faire du Luxembourg un des hauts lieux de l’exploitation économique de l’espace.
« Que la force soit avec nous ! » Étienne Schneider ne l’a pas dit, mais cela aurait bien résumé le débat sur le projet de loi autorisant le space mining à la Chambre. En effet, ce jeudi, le ministre a obtenu le soutien d’une écrasante majorité pour sa démarche encore controversée il y a quelques mois. Franz Fayot, rapporteur du projet de loi, ne s’était pas privé d’évoquer « Star Wars », en affirmant qu’une partie du CSV était du « côté obscur » – celui des critiques du programme spatial.
Pourtant, le Conseil Jedi, pardon, le Conseil d’État lui-même avait émis de fortes réserves en avril, notamment en ce qui concerne la sécurité juridique de l’appropriation des ressources spatiales. Ce qui n’avait d’ailleurs pas conduit les investisseurs et entrepreneurs à bouder le ministre de l’Économie, en voyage de prospection aux États-Unis au même moment.
L’intervention d’André Bauler, avec ses références historiques, aide à comprendre l’engouement des financiers et l’assentiment parlementaire : en fait, il s’agit d’une énième façon d’exploiter une niche économique en monnayant la souveraineté du Luxembourg. Ainsi, le Luxembourg sera le deuxième pays, après les États-Unis, à garantir la propriété des ressources rapportées sur terre par des sociétés privées.
Si le député DP avait émaillé son discours de références littéraires allemandes, son collègue vert Gérard Anzia se tourna vers la bédé belge : en 1953, Tintin sur la Lune semblait être de la science-fiction ; 16 ans plus tard, c’était devenu une réalité. De même, pour Anzia, le space mining ouvre la perspective concrète d’un développement durable de l’espèce humaine dans l’espace, en considérant les aléas auxquels est soumise la Terre.
Eih bennek, eih blavek
Enfin, les intervenants CSV et ADR s’attachaient aux questions internationales. Face au flou juridique du traité de l’espace actuel, Laurent Mosar plaida pour des initiatives bilatérales ou au niveau de l’OCDE. Quant à Roy Reding, il félicita Schneider d’agir en dehors des contraintes internationales, et notamment d’ignorer le traité sur la Lune, qui considère que l’utilisation des ressources spatiales est « l’apanage de l’humanité tout entière ».
Comme souvent, on pouvait avoir l’impression qu’à la Chambre ne siège qu’un seul parti d’opposition : Déi Lénk. Le député Marc Baum fustigea la politique de niche et la « privatisation de l’espace » ne servant l’intérêt que de « quelques milliardaires ». Il mit en garde contre l’idée de surexploiter les ressources terrestres en comptant sur celles fournies par l’espace. Enfin, il s’inquiéta des conséquences d’une « ruée vers l’or » sauvage : mise à l’écart des pays en développement, risques de guerres.
Dans son intervention finale, Étienne Schneider avait beau jeu de répondre aux petites piques de Mosar et Reding, notamment en se réjouissant d’avoir été « plus malin que les Américains » pour attirer du capital risque. Il finit en remerciant tout le monde pour l’impression favorable que la Chambre avait laissée aux observateurs internationaux – tout le monde, sauf Déi Lénk, dont il laissa sans réponse les critiques de fond. Est-ce cela qu’on appelle un débat ?