Traditions anciennes des lettrés, difficile passé récent, modernité écrasante – une approche artistique des multiples visages de la Chine. Si Bruxelles vaut toujours une visite, cela est encore plus vrai durant le festival Europalia. A trois heures de train du Luxembourg, vous pouvez plonger dans l’univers de l’Empire du milieu. Les grandes expositions sont consacrées à la magnificence impériale des « Fils du Ciel », à l’exotisme de la « Route de la Soie » et à l’art moderne reflétant le « State of Things ». Mais il y a aussi possibilité de se balader hors des sentiers battus.
Au Musée royal des beaux-arts, on pourra ainsi découvrir une présentation inspirée d’un des repères de la culture chinoise, la calligraphie. « Le pavillon des orchidées » permet de contempler le célèbre manuscrit éponyme, mais surtout d’appréhender l’art d’écrire dans ses multiples fonctions sociales, plutôt que de le présenter de manière chronologique. Il y a notamment des salles consacrées aux relations entre la calligraphie et la politique, la religion ou la peinture, ainsi que des oeuvres d’artistes contemporains tentant dépasser la tradition tout en l’intégrant.
Juste à côté, à l’espace ING, on trouvera une introduction particulièrement pédagogique à la condition du lettré chinois, intitulée « Les trois rêves du mandarin ». D’un côté, les hauts fonctionnaires cultivaient leur image d’intellectuel, ce qu’illustrent les pinceaux et pierres d’encre, ainsi qu’un impressionant catalogue de « vente par correspondance » de pains d’encre gravés. De l’autre, se développait une sorte de « bohême », tournant le dos aux activités et arts officiels et cherchant sa propre voie. On pourra notamment contempler quelques peintures du grand Shi Tao, complétées par un film sur sa démarche artistique. Autre élément de fantaisie dans la vie des lettrés : les relations amoureuses, notamment avec les poétesses, la calligraphie et le dessin étant apparemment réservés au sexe mâle.
En ce qui concerne les arts graphiques, cela n’est plus le cas. Pour s’en convaincre, il suffit de passer par l’exposition « Attitudes », à la « Centrale électrique », qui regroupe des oeuvres d’artistes contemporaines. Contrairement à leurs confrères qui ont souvent une approche très intellectualisée de l’art, celles-ci misent plutôt sur la sensualité et la sensibilité. Aussi bien les statues féminines de Xiang Jing que les fragiles collages d’objets de Song Kun interpellent sur la place des femmes et celle de leur vécu intérieur dans cette Chine qui court après l’argent et le succès. L’installation de Jiang Jie nous fait marcher sur des sachets en soie rose contenant des tuiles, qui évoquent les toits des vieux quartiers des villes chinoises, et à travers eux, les souvenirs de cette Chine en train de disparaître. Bons et mauvais souvenirs, selon l’artiste.
L’exposition de photos « Les habits neufs de Pékin » de Maria Fialho à l’Université libre de Bruxelles nous rappelle également la complexité de ce sujet. Les attitudes et sentiments des Chinois-es par rapport à leur passé sont un mélange de pragmatisme, de nostalgie et de rejet. Les images montrent les conditions de vie difficiles dans les vieux quartiers, mais aussi la convivialité. D’autres photos mettent en scène des jeunes apparemment décalés aussi bien par raport aux traditions que par rapport aux conventions de la Chine d’aujourd’hui. Et que dire de ces clichés bouleversants de souvenirs et de photos de famille mis en vente aux puces par des inconnu-e-s ? Pour devoir s’en libérer de cette manière, leur passé doit peser bien lourd.
Les expositions mentionnées restent ouvertes jusque fin janvier, voire mi-février, sauf la dernière, qui se termine le 31 décembre. Le festival (www.europalia.be) se poursuit encore jusqu’au 14 février, jour de nouvel an chinois.
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