Cinéma : L’envers du décor

Au Cercle Cité, l’exposition « Ready. Set. Design. » nous montre une autre facette du Luxembourg : celle d’un pays devenant un décor de cinéma à ciel ouvert.

Photo : Nuno Lucas da Costa

À la veille du prochain Luxembourg City Film Festival (du 4 au 14 mars), l’historien Paul Lesch, directeur du Centre national de l’audiovisuel, Chiara Lentz et Yves Steichen, également membres du centre dudelangeois, rendent un précieux hommage à la scénographie et aux décors des productions et coproductions luxembourgeoises réalisées pendant les quarante dernières années. Surprise pour les uns, nostalgie pour les autres, il est possible de (re)voir d’anciens clichés montrant le Luxembourg travesti en espaces plus improbables les uns que les autres. Ainsi, il est arrivé que les abords du cimetière de Bonnevoie se transforment en banlieue de Jérusalem, que l’avenue de la Liberté devienne une rue parisienne, que le bâtiment de la mairie d’Echternach se téléporte vers La Nouvelle-Orléans, que l’ancien bâtiment de RTL Group s’érige en quartier général de la CIA ou encore que la Grand-Rue du centre-ville se délocalise à Londres. Tout cela grâce à l’irremplaçable magie du septième art, moyennant l’ingéniosité du montage, du cadrage, de l’éclairage, de la musique et bien sûr des décors. Dans un contexte hors OpenLux, il convient de rappeler que les avantages fiscaux mis en place en 1988 par le gouvernement de l’époque dans le domaine de l’audiovisuel ont depuis su attirer un grand nombre de productions étrangères au grand-duché.

L’économie mise à part, Paul Lesch nous explique que « l’idée était de montrer les coulisses des coulisses d’un tournage ». Tel un cours de cinéma, cette exposition nous résume simultanément les trois sacro-saintes étapes de la réalisation d’un film : la préproduction (script, repérages des lieux pour le tournage des scènes, etc.), la production (tournage) et la postproduction (montage). La dernière des quatre parties, intitulée « All That Glitters Is Not Gold », clôt avec brio l’exposition et pourrait à elle seule faire entrer n’importe quel-le passant-e doté-e d’un brin de curiosité. Photos petit et grand formats à l’appui, le visiteur et la visiteuse connaîtront l’histoire du plus grand décor jamais construit au Luxembourg. En effet, en 2001, l’ancienne friche industrielle d’Esch-sur-Alzette voit naître en quelques mois une parfaite réplique de certaines parties de la ville de Venise. Plus de 300 ouvriers bâtissent cette nouvelle cité flottante. À l’époque, comme dans un parc d’attractions, il était même possible de faire un tour à travers ce site lorsqu’il n’y avait pas de tournages. « J’y étais ! », témoigne fièrement David Barbaro, venu revoir les photos de ce décor gigantesque et se remémorer sa participation en tant que figurant dans le film « The Merchant of Venice » de Michael Radford, aux côtés d’Al Pacino le temps d’un plateau. L’espace a été démantelé en 2007.

Globalement, on décèle un travail de longue haleine dans les recherches effectuées. À la fin, la qualité est au rendez-vous et l’on ne sort pas déçu. Toute l’expo est soigneusement documentée, sans parler de l’ample cartographie de tous les espaces naturels, ruraux et urbains du pays ayant servi de décors aux diverses productions. Un grand nombre de personnes ont d’une façon ou d’une autre participé à l’un des films évoqués, créant ainsi une sorte de mémoire collective. Comme nous confie Paul Lesch à juste titre, « l’expo est une sorte d’hommage au cinéma et surtout aux personnes qui le font ». Il s’agit bien sûr d’honorer celles et ceux que l’on voit uniquement listé-e-s dans les génériques finaux… quand on prend le temps de les regarder.

Au Cercle Cité, jusqu’au 11 avril 2021.

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