Démission Hulot : Échec et crac

Un ou une ministre qui jette l’éponge, ça interpelle. Surtout quand, comme Nicolas Hulot, arguments et interrogations accompagnent la démarche.

Essayer de convaincre… et échouer. (Photo : Nicolas Hulot à la Fête de l’Huma en 2008, prise par Olivier « toutoune25 » Tétard, sur Wikimedia en CC BY-SA 3.0)

C’est le ministre de la Transition écologique qu’a reçu l’équipe du « grand entretien » sur France Inter, le matin du 28 août. C’est le citoyen Nicolas Hulot qu’elle a remercié 40 minutes plus tard. La figure de proue de l’écologie, particulièrement controversée depuis qu’elle était entrée au gouvernement, avait décidé en cours d’entretien d’annoncer sa démission en direct.

« Derrière la démission de Hulot, l’échec flagrant du néolibéralisme vert », a titré Mediapart. Ce genre d’interprétation est représentatif des réactions de nombreux-ses progressistes – les mêmes qui avaient prédit à Hulot que ça ne pouvait pas marcher sous la présidence d’Emmanuel Macron. Pourtant, le ton de la plupart des commentaires est bienveillant à son égard – c’est plutôt la politique du gouvernement qui est fustigée.

Écologie naïve ?

Sur Reporterre.fr cependant, on trouve une chronique plus acerbe : « Le départ de M. Hulot n’est ni surprenant, ni courageux », estime l’écoanarchiste Isabelle Attard. Elle voit dans la démission une opération de « sauvetage d’image » et estime que « quelqu’un de cohérent et lucide n’aurait jamais mis un orteil dans ce gouvernement ». Il est vrai que l’opportunité d’entrer dans un gouvernement mis en place par Macron était discutable, mais à entendre Hulot, on pouvait croire en sa bonne foi. Rappelons que ce n’était pas la première tentative de la politique de récupérer l’écologiste médiatique – Hollande et Sarkozy n’avaient pourtant pas réussi à le convaincre de franchir le pas.

D’après ses propres dires, l’ex-ministre savait qu’influencer la politique sous Macron serait difficile. Mais il avait compté sur sa force de conviction dans un contexte qu’il croyait favorable à une prise de conscience des défis écologiques. Par ailleurs, on peut difficilement faire le lien, comme Romaric Godin dans l’article sur Mediapart, entre Hulot et la « promesse » de Macron « de gérer la transition écologique en poursuivant des politiques économiques ‘orthodoxes’. » Sur France Inter, l’ex-ministre a en tout cas insisté sur la dimension sociale de la crise écologique et ses liens avec les mouvements migratoires, concluant à la nécessité d’une politique contre les inégalités.

Grande catastrophe à petits pas

En juillet, après un an au ministère, Hulot pouvait considérer son bilan comme mitigé, tout en gardant l’espoir de progresser. Mais suite à la canicule de cet été, liée au changement climatique, il n’a pu que constater l’écart entre la sensation d’urgence éprouvée par lui et de nombreux-se-s écologistes, et l’indifférence des élites au sein desquelles il évoluait. Sur France Inter, il a souligné le fait que « la situation de la planète ne s’accommode pas des petits pas ».

Un constat qui devrait interpeller les partis verts du monde entier et l’ensemble des hommes et femmes politiques attaché-e-s à la préservation de l’environnement. Que peut-on obtenir en entrant dans un gouvernement en tant que « junior partner » ? Jusqu’où aller dans les compromis et les concessions ? Quand démissionner ?

Ensemble contre les lobbys !

Hulot n’a pas minimisé l’importance du système économique actuel et regretté que ses interlocuteurs ne veuillent pas comprendre que « c’est le modèle dominant qui est en cause, le libéralisme ». Il n’en a pas moins ménagé le gouvernement et évoqué ses rapports amicaux avec le président et le premier ministre. Sa rancune était plutôt dirigée contre les lobbys, omniprésents dans les cercles du pouvoir, au point de soulever la question de savoir « qui a le pouvoir, qui gouverne ? »

Face à ces difficultés, Hulot s’est senti seul, alors qu’il s’attendait apparemment à ce qu’émergent, entre ministères et entre acteurs économiques, des coopérations de type win-win. En contrepoint, il a insisté sur la responsabilité collective de l’ensemble de la société. On pourrait comprendre qu’après avoir échoué à forcer la transition par le haut, l’ex-ministre compte désormais surtout sur les mouvements collectifs pour faire la transition par le bas.


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