On ne peut pas dire que Tom Hengen soit un poète omniprésent sur la scène littéraire locale : avec « Journeys into Modern Mythologies », le vainqueur du Concours littéraire national 2011 publie son deuxième recueil seulement. Une lente maturation qui se sent dans les textes de ce court mais intense recueil.
S’il fallait dévoiler un fil conducteur aux trois parties de « Journeys into Modern Mythologies », ce serait celui du voyage intérieur. Un voyage intérieur qui non seulement explore la psyché du poète et narrateur, mais qui relie celle-ci à la vaste expérience humaine, à toutes les époques, dans tous les lieux – surtout à notre époque, puisque l’auteur y est fermement ancré. Ce sont là les mythologies modernes du titre, qui irriguent les vers tout au long de l’ouvrage.
Pas étonnant donc que la première partie, « The Memorable Journey », s’attelle à reproduire les impressions de l’exposition « The Family of Man », dans un vaste ensemble de saynètes à la séduction très visuelle. « Breastfeeding the present future, / Eyes purified in love eternal », lit-on par exemple : Tom Hengen manie les métaphores devant les photographies, mais fait preuve également d’une empathie communicative, d’un désir d’harmonie et de fraternité clairement décelable qui se propagera également dans les parties suivantes. Plus descriptive, moins lyrique que la suite, sa visite guidée de l’exposition est un tremplin vers l’exploration.
Et celle-ci commence fort dans la partie « Pirates and Slaves », avec le poème « Startling Start » qui fait la part belle aux allitérations, comme le titre le laisse pressentir. La langue du poète s’étoffe, se pare de figures de style, gonfle les voiles de ses strophes. Il ne snobe pas la bonne vieille rime lorsqu’elle le sert ; il convoque le lyrisme, mais sans afféterie. Qu’il s’attelle à décrire des créatures surnaturelles ou des paysages, qu’il rende hommage à un ami disparu, Hengen fait courir au travers de ses poèmes un message humaniste : « what good could be borne / If we took care of the broken. »
Pour terminer, la partie « Songs of a Travelling Mind » met l’accent sur ses voyages avec son fils. On y découvre plus de poésie narrative, de Cwm-yr-Eglwys à San Diego, mais l’écriture se resserre en même temps sur l’intime, après les voyages souvent imaginaires de la deuxième partie. Et l’odyssée se termine en moins de 70 pages, qui ne demandent qu’à être relues pour en saisir à nouveau les infimes secrets que le poète a distillés dans ces textes longuement infusés. L’éternel recommencement, n’est-ce pas là aussi un mythe ?