Colocations à Esch : le ministère de l’Intérieur ne peut (presque) rien faire

Dans la polémique autour du règlement des colocations dans la ville étudiante d’Esch-sur-Alzette, où le conseil échevinal s’est mis en tête de vouloir régulariser sa politique de gentrification en s’attaquant à ce mode de vie, la ministre de l’Intérieur n’a pas grand-chose à dire.

(©Pixabay Congerdesign)

Même en plein été, la querelle autour du plan d’aménagement général (PAG) eschois n’est pas près de se calmer. Et pour cause : le bourgmestre Georges Mischo et sa majorité noir-bleu-vert campent sur leurs positions et essaient de jouer la montre en promettant une campagne d’information – tout en laissant les concerné-e-s devant le statu quo. Ce qui est surtout irritant pour celles et ceux dont la colocation n’a pas été reconnue par les services de la Ville d’Esch et qui sont donc mis sur le registre d’attente. Or, être inscrit-e sur ce registre ne veut pas seulement dire qu’on ne peut pas commander une poubelle ou un certificat de parking résidentiel, mais qu’on est aussi privé-e d’accès à des mesures sociales comme l’allocation de vie chère et le Revis.

Ce qui fait dire à l’opposition que les mesures préconisées par le collège échevinal sont bel et bien asociales et visent à exclure une certaine couche de la population du centre-ville – du moins des maisons unifamiliales. Des arguments que l’équipe Mischo et Knaff refuse en bloc. Une possible arbitre pourrait être la ministre de l’Intérieur Taina Bofferding – même s’il est vrai que sa neutralité dans le dossier peut être mise en doute, vu qu’elle a été conseillère municipale eschoise (de 2011 à 2018) pour le compte des socialistes, désormais rélégué-e-s aux bancs de l’opposition.

Règler les colocations par le PAG reste illégal

Le problème principal reste le PAG, qui aurait dû être voté en deuxième lecture et donc en définitive avant les vacances d’été. Suite aux désaccords, ce vote tout de même crucial a été repoussé à l’automne – Mischo disant qu’il veut un vote à l’unanimité. Mais ce changement de calendrier, surtout sans fixer de date précise, peut aussi être un angle d’attaque. C’est ce que le député et conseiller communal eschois Déi Lénk Marc Baum s’est probablement dit en posant toute une série de questions à la ministre sur ce qui arrive quand une commune ne respecte pas certaines finesses du PAG. En effet, la ministre avait déjà constaté que le règlement des colocations par le biais du PAG n’était « pas du ressort de ces instruments juridiques [du PAG] » et en conséquence illégal, dans une autre réponse à un parlementaire. Or, la loi stipule qu’au plus tard trois mois après le premier vote sur le PAG, le conseil communal doit approuver ou rejeter celui-ci si des illégalités sont constatées. Le problème est que cette date du deuxième vote aurait dû être le 7 janvier de cette année.

À la question de savoir quelles conséquences sont prévues si une commune ne respecte pas cette loi, Bofferding répond qu’elle n’y peut pas grand-chose, puisqu’il s’agit d’un ordre et non pas d’un délai de rigueur. Tandis que ce dernier pourrait entraîner des sanctions en cas de non-respect, le délai d’ordre est indicatif et a « pour objectif d’accélérer l’action administrative ». Au-delà de la question de l’efficacité de tels délais, se pose également la question de savoir si une telle législation ne provoque pas des lenteurs et n’encourage pas les batailles politiques locales. Car, uniquement dans l’hypothèse d’un report « sine die » du vote, des conséquences sont possibles de la part du ministère ou de la justice. Encore faut-il définir quand l’éternité a assez duré avant que cette mécanique se mette en branle.

Un brin d’espoir se dégage tout de même des réponses aux trois dernières questions du député ; elles concernent la possibilité d’application de mesures illégales – telles que qualifiées par la ministre. Pour Bofferding, le premier vote provisoire n’instaure qu’un moratoire jusqu’au vote définitif, mais aucunement un chèque en blanc pour appliquer des règlements non conformes. Finalement, la ministre se dit prête « à effectuer un contrôle de légalité et à sanctionner, le cas échéant, toute violation », fait-elle savoir. Ce n’est donc que partie remise.


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