Jesús Iglesias, membre du conseil d’administration du Círculo Cultural Antonio Machado, annonçait en septembre dernier dans le woxx que « la première activité d’envergure l’année prochaine [serait] le concert de l’altiste Isabel Villanueva, le 24 janvier, à Neimënster ». La date annoncée approche et l’artiste (née à Pampelune en 1988) a accepté de s’entretenir avec nous.
Dans la revue spécialisée « Scherzo », Tomás Marco, compositeur et directeur de la Real Academia de Bellas Artes de San Fernando (Madrid), a affirmé récemment qu’Isabel Villanueva « est une grande altiste soliste qui développe une large carrière internationale. Elle a un son magnifique, une technique irréprochable et une polyvalence d’interprétation qui fait voler, chanter et s’exprimer l’alto avec une voix enchanteresse ».
Jesús Iglesias a signalé également au woxx que l’altiste « n’est pas complètement inconnue au Luxembourg, car Pizzicato, revue luxembourgeoise spécialisée en musique classique, a publié une critique très élogieuse de son dernier disque, ‘Ritual’, que nous écouterons à Neimënster ». Ajoutons que l’album « Ritual » a été nominé dans la catégorie « Meilleur solo instrumental » aux International Classical Music Awards (ICMA) 2024.
woxx : Ce sera votre première représentation au Luxembourg. Comment introduiriez-vous votre « Ritual » auprès du public luxembourgeois ?
Isabel Villanueva : « Ritual » sera un concert adressé à tout le monde : les plus âgés, les plus jeunes, les mélomanes, les curieux, les gens qui ne sont jamais allés à un concert, les personnes qui éprouvent de la curiosité envers le titre ou envers la musique produite par un seul instrument… Et surtout, les spectateurs assisteront à quelque chose qui dépasse la notion de concert proprement dit : il s’agit plutôt d’un projet musical avec une composante mystique, qui est importante pour moi et que je souhaite partager avec le public. Ce sera une expérience, un voyage à la fois musical et mystique, que chaque personne pourra vivre de façon individuelle. Un parcours musical qui embrassera plus de 1.000 ans, depuis Hildegarde de Bingen jusqu’à la « Passacaille » de Biber, en passant par Bach et Kurtág. Je souhaite partager ce voyage avec chaque personne qui voudra venir, et je veux que cette transmission soit individuelle. Chaque concert est unique, à l’instar de chaque contexte, de chaque lieu, de chaque personne, de chaque ambiance. Jusqu’à présent, chaque concert de « Ritual » a été très émouvant et singulier. Et celui à Neimënster, de surcroît, sera le premier de cette année, dans un pays qui est nouveau pour moi.
Voyage musical et mystique
Qui sera en face du public ?
Nous serons deux : moi et mon alto. « Ritual » est le résultat d’une série d’expériences liées à mon évolution. J’ai ressenti le besoin de réaliser ce projet comme conséquence de certaines circonstances postpandémiques, professionnelles et personnelles. Pouvoir transmettre ce vécu à travers un instrument du 17e siècle, c’est aussi spécial. Il faut rappeler que l’alto est antérieur à Bach… « Ritual » est un projet chargé de symbolismes, à commencer par l’ordre et le nombre des pièces, puis le choix des compositeurs, la présentation… Même la date du 24.1.24, sans que je l’aie voulu, est très spéciale. J’aime beaucoup les chiffres ! Il y aura donc moi, une personne à l’âme ancienne, qui a vécu, et mon alto, qui est un instrument singulier, qui représente l’essence de ce rituel. Vous pourrez apprécier la diversité de possibilités de transmettre d’un être, que ce soit une personne ou un instrument. C’est un concert qui engage complètement la musicienne. Il faut se mettre à nu et le spectateur le ressent. Plutôt qu’un concert, c’est donc une expérience, celle d’écouter un instrument solo. Ensuite, il s’agit d’un alto, et, en plus, c’est un rituel. Chaque concert est d’ailleurs un rituel, qui comprend beaucoup de questions, et chaque personne le transfère vers sa propre vie : c’est une expérience vitale tant pour moi que pour chaque spectateur.
Se mettre à nu
Vous avez joué « Ritual » dans des endroits fort différents. Comment se présente le projet en 2024 ?
J’ai présenté « Ritual » en Allemagne, en automne dernier, ainsi qu’en Espagne, dans plusieurs lieux. Je tiens à ce que les caractéristiques des espaces varient, depuis une église jusqu’à une salle moins formelle. Dans chaque endroit l’expérience change. Chaque rituel est unique. Après Luxembourg, en février, « Ritual » sera présenté dans ma ville natale, Pampelune, et dans d’autres villes espagnoles : Avilés, Madrid, Manrèse… J’ai plusieurs projets pour l’avenir, d’autres concerts avec piano sont aussi prévus. Mais pour l’instant, j’ai besoin de rester concentrée sur mon « Ritual », qui est tout récent.
Parlez-nous de l’enregistrement.
Il a été intense, presque comme un direct. J’ai choisi de le faire dans une église du 12e siècle, San Juan de los Caballeros, à Ségovie, où j’avais fait un concert pendant la pandémie et où j’avais ressenti une énergie très spéciale, en plus de l’acoustique formidable. Je n’aurais pas pu enregistrer « Ritual » dans un studio : c’est trop vivant.
Pourriez-vous imaginer de jouer du flamenco avec votre alto ?
Je suis une passionnée de flamenco. Le flamenco, c’est la vie ! J’ai un projet avec le grand guitariste Miguel Ángel Cortés et je sais que tôt ou tard ça arrivera. Le moment venu, vous le saurez ! Le flamenco a accueilli beaucoup d’instruments autrefois impensables : harpe, basson, violon, flûte, saxophone… mais jusqu’à présent il n’y a pas eu d’alto, et pourtant je crois que cet instrument s’y prête très bien. En 2019, avec Rocío Márquez et Miguel Ángel Cortés, nous avons fait un concert ensemble, dans le cadre du festival Flamenco on Fire. Le résultat a été très beau.
Dans quelques jours, vous jouerez et vous réveillerez dans une ancienne abbaye qui a également été une prison, placée dans un lieu mythique de la fondation du Luxembourg…
Jouer mon « Ritual » dans une ancienne abbaye me plaît bien, et que sur cette surface il y ait eu aussi une prison rendra l’expérience encore plus intense. La musique contient un puissant élément de guérison. Je sens que ce sera une expérience marquante.
Le 24 janvier à 20h, salle Robert Krieps à Neimënster. isabelvillanueva.com
Das könnte Sie auch interessieren:
- Black Metal aus Luxemburg: Tanz in der Asche
- Popsänger Khalid Oke im Gespräch: „Meine Musik ist größer als ich“
- „Fête de la Musique“ in Luxemburg-Stadt: „CID Fraen an Gender“: Für mehr Gleichheit in der Musikbranche
- Heavy-Metal-Nacht: Der Abriss von Oberkorn
- Die Initiative „Attitude Music“: „Es lohnt sich, auf die Zähne zu beißen“