Si vous passez dans la rue de Reims, votre attention sera captée par les vitrines bigarrées de la galerie Painture Calon, un établissement où Philippe et Christel Calon fabriquent et vendent du pain (bio)logique, où sont exposés des dessins du jeune Jeremy, leur petit-fils, où l’on peut découvrir le travail de peintres cubains, feuilleter des livres d’art en espagnol ou regarder des photos de Cuba, des portraits de Fidel Castro et de Jean-Paul Belmondo, ce dernier avec à ses côtés Philippe Calon !

Photo : Paulo Lobo
Né le 21 décembre 1942 à Tourcoing, d’une mère eschoise, Philippe Calon est arrivé au Luxembourg en 1957. En 1968, il a passé son examen de maîtrise comme pâtissier-confiseur à Luxembourg. Il a aussi été barman chez Walter, un milk-bar situé au 49, boulevard Royal, le seul bâtiment ayant survécu aux derniers travaux de ce coin du centre-ville. Après la fermeture de son magasin rue Philippe II, il s’est établi dans le quartier de la gare.
Philippe Calon : Depuis 50 ans, je travaille dans ce quartier. Avant de m’installer ici, j’avais travaillé à la rue Joseph Junck, chez un boulanger, et après chez le pâtissier Trierweiler. En 1990, j’ai acheté la maison où je suis établi, rue de Reims. À l’époque, la plupart de mes voisins étaient des Italiens et des Portugais.
Christel Calon : Nous avons été les premiers à faire du pain bio, mais cela était compliqué, car il fallait obtenir l’autorisation de l’Europe et payer beaucoup d’argent.
C’était une bonne idée, de venir habiter dans ce quartier ?
Philippe Calon : Les débuts ont été difficiles. J’ai ressenti un rejet général. Presque tous les jours, mes vitres étaient cassées.
Au bout de 32 ans, je me suis plus ou moins adapté. J’ai de bons rapports avec le voisinage. Je fais couper mes cheveux chez le coiffeur d’à côté et je bois dans les bistrots du coin.
Le pain biologique est devenu juste logique
Ce quartier a toujours eu une ambiance mouvementée, la drogue et la prostitution y étaient déjà à l’époque, mais il ressemblait à un Chicago sans violence, disons un Chicago bon enfant.
Depuis lors, la situation a changé et a empiré. Autrefois, le quartier était assez vivable, mais aujourd’hui, avec les drogué-es et les trafiquants, la police qui est là à 5 heures du matin… Le quartier a été abandonné à la violence. Et il est en train de devenir le quartier le plus cher de la ville. Plein de bâtiments sont en train d’être vendus. La covid a contribué à le vider. Et où voulez-vous sortir le soir ?
Depuis que les travaux pour le tram ont commencé, les commerçants sont ruinés. La clientèle s’est déplacée vers les grandes surfaces. Avez-vous vu l’état de l’avenue de la Liberté et celui de l’avenue de la Gare ? Et ensuite, vous voyez la police qui du matin au soir met des PV… Alors, vous allez acheter une baguette à 2 euros et vous finissez par payer une amende de 60 euros pour avoir stationné cinq minutes où c’est interdit… on n’est plus à la gare ! Tant que la politique communale ne respectera pas les petits commerçants, nous ne nous en sortirons pas.
Avez-vous un lieu préféré ?
Chez moi ! Tout le monde s’y retrouve !
Le quartier de la gare raconté par ses habitant-es
Le tram fonctionne, les travaux et la pandémie sont presque finis. Paca Rimbau Hernández repose la question qu’elle avait déjà posée – en 1999-2000 et en 2019-2020 – à des personnes qui résident ou travaillent dans le quartier de la gare : « Que reste-t-il de nos amours ? » (à retrouver dans les archives du woxx).
Das könnte Sie auch interessieren:
- Que reste-t-il de nos amours ? (et 10/10) : « Une main lave l’autre, les deux lavent le visage »
- Que reste-t-il de nos amours ? (9/10) : « Là où il y avait le Victory… »
- Que reste-t-il de nos amours ? (8/10) : Le flair de la grande ville
- Que reste-t-il de nos amours ? (7/10) : D’une langue à l’autre
- Que reste-t-il de nos amours ? (6/10) : Que la vie reprenne