Satellite luxo : c’est cher, la guerre !

Un projet de satellite d’observation, bâclé en 2018, se révèle deux fois plus cher que prévu. La plateforme pour la paix FSPL s’insurge contre le scandale financier et sur les choix politiques sous-jacents.

Vaisseau « Corona ». Le satellite de reconnaissance américain KH-4B de la fin des années 1960 s’appelait vraiment ainsi.
(Wikimedia ; PD-USGov)

La plateforme pour la paix cite le « ministre de la guerre ». « Un déroulement malheureux et précipité », c’est ainsi que François Bausch a qualifié la procédure d’acquisition d’un deuxième satellite militaire luxembourgeois. Il s’agit du National Advanced Optical System (NAOS), pour le financement duquel le gouvernement vient de déposer un second projet de loi, après celui de 2018. C’est que l’estimation des coûts de ce satellite d’observation terrestre a plus que doublé entre-temps.

« Un amateurisme scandaleux », c’est ce qu’un communiqué de l’ONG « Friddens- a Solidaritéitsplatform » (FSPL) reproche au gouvernement (original en allemand). Elle se demande aussi si les 350 millions prévus actuellement (après 170 millions annoncés en 2018) suffiront pour financer le projet. « Les explications du gouvernement se présentent comme un désastre administratif : la relocalisation du contrôle du satellite depuis la caserne de Diekirch vers Redu en Belgique, puisque la gestion et la maintenance ne seraient pas possibles au Luxembourg. »

Bausch et Schneider, criminels de guerre ?

La FSPL relève encore qu’en 2018, le projet de loi était déposé sans que les études préliminaires soient clôturées, et que l’attribution du marché laissait un arrière-goût (en fait, ce serait la même société OHB qui aurait mené les études puis obtenu le marché). La FSPL exprime encore son attente que, « lors des sessions de la commission parlementaire et du parlement, toute la transparence soit faite sur ce ‘désastre administratif’. Ce serait aussi l’occasion de s’interroger sur le soutien militaire à l’Otan dans le cadre de la politique spatiale nationale ».

Ce que la FSPL n’explicite pas, c’est qu’en mettant des satellites au service de ses « partenaires » dans le cadre d’opérations militaires, le Luxembourg risque d’être impliqué dans des crimes de guerre, notamment à travers le bombardement de civil-e-s et les « assassinats ciblés ». Notre pays ne sera guère en mesure de s’opposer à des usages non souhaités des satellites, puisque l’exposé des motifs du nouveau projet de loi 7542 avoue que la gestion opérationnelle « demande des compétences techniques spécifiques, dont l’Armée ne dispose pas et qu’elle ne pourra pas développer à moyen terme ». En externalisant cette gestion, le Luxembourg ouvre la porte à la perpétuation de crimes de guerre en dehors de son contrôle, mais sous sa responsabilité juridique.

La FSPL contre NAOS et GovSat

La FSPL ne se contente pas de critiquer le NAOS, mais rappelle aussi que le satellite de communication GovSat-1, déjà en orbite, peut être utilisé à des fins militaires. Conclusion : « Pas besoin de beaucoup de réflexion pour se rendre compte des possibilités d’emploi de GovSat-1 et de NAOS. La plateforme est d’avis que cette politique satellitaire a peu de chose à voir avec des mesures en faveur du maintien de la paix. »

Rappelons que cette approche « win-win-win » est l’héritage d’Étienne Schneider, qui cherchait ainsi à satisfaire en même temps l’exigence d’augmenter les dépenses militaires et la volonté de développer le secteur spatial. Or, son collègue de parti Jean Asselborn vient de déclarer sur RTL, au vu de la crise du coronavirus, qu’il vaudrait mieux que les pays de l’Otan investissent dans la recherche plutôt que dans l’équipement militaire. François Bausch, ministre de l’armée issu du parti vert, un parti né notamment des mouvements pacifistes des années 1970, trouvera-t-il le moyen de libérer le Luxembourg de la dérive militariste néfaste due à son prédécesseur ?

 


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