Sit Bach and Relax

Certes, on a pu pratiquer tous les jeux de mots les moins originaux sur le nom du grand compositeur… mais ce mardi 22 octobre, le récital d’Antoine Tamestit à l’alto et de Masato Suzuki au clavecin a réussi la performance d’à la fois stimuler et relaxer.

Photos : Philharmonie/Éric Engel

C’est avec la première sonate pour viole de gambe et clavecin que s’ouvre le récital du duo franco-japonais, entièrement consacré à Bach. Pas pour alto et clavecin ? Non, car comme l’explique Antoine Tamestit dans le programme, « la clé de lecture est la même que celle de la viole de gambe et nécessite donc très peu d’arrangements ». Et c’est vrai que la combinaison d’instruments sonne particulièrement bien dans une salle de musique de chambre presque intégralement remplie : moins brillant que le violon, l’alto séduit plus qu’il n’impressionne, et Tamestit sait parfaitement tirer parti des graves ronds et des médiums doux de son Stradivarius de 1672. Quant à Suzuki, il utilise avec habileté les jeux du clavecin, tour à tour accompagnateur, duettiste et soliste. Rarement l’un couvre l’autre, dans un échange musical qui donne aux notes du cantor de Leipzig des accents résolument amicaux. Comme cette amitié qui caractérise la relation de dix années entre les interprètes, tout en complicité, et qui s’étend tout naturellement à l’audience, séduite dès ce premier morceau.

Au cours du programme, deux autres sonates pour viole de gambe et clavecin sont jouées dans une transcription pour alto, toujours avec cette alchimie qui fait plaisir à voir. Mais bien entendu, impossible de ne pas montrer au public rapidement conquis les talents individuels des deux musiciens de ce soir. C’est pourquoi, dans la première partie, Masato Suzuki offre au clavecin la « Suite française no 5 en sol majeur », avec une belle science du phrasé et de l’ornementation, soulignant les accords dissonants lorsqu’ils surviennent pour confirmer la modernité du grand Bach (même s’ils sont résolus, bien sûr), tricotant des doigts dans les mouvements rapides, telle cette gigue finale virtuose. Pour ouvrir la seconde partie, Antoine Tamestit, lui, reste dans la transcription avec la « Suite pour violoncelle no 2 en ré mineur » : parfaite pour l’alto dont les cordes sont exactement une octave plus bas que le violoncelle, celle-ci prend avec le changement d’instrument un caractère moins résonnant ou ostentatoire, plus soyeux. La technique de l’altiste, évidemment, est impeccable.

Pour terminer la soirée, devant l’enthousiasme de l’audience, les deux compères proposent une première œuvre non transcrite… enfin presque ! C’est le grand solo d’« alto obbligato » de la « Cantate no 5 » qui constitue le bouquet final, l’orchestre et le ténor étant eux joués au clavecin. Une longue mélodie suave, presque obsédante, qui permet de poursuivre le bain délicieux dans cette combinaison instrumentale à la séduction discrète mais bien réelle. Et voici qu’il faut replonger dans le quotidien, après ces quelques moments passés avec Bach et ses talentueux interprètes. La parenthèse ne sera pas oubliée de sitôt.


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