Les frontières se ferment face à la crise du coronavirus. Une exception est faite pour les flux de main d’œuvre frontalière ou saisonnière dont on a besoin. Exception qui devrait redevenir la règle !
La bonne nouvelle : les professionnel-le-s des secteurs médical et social qui vivent en République tchèque et travaillent en Allemagne ou en Autriche peuvent à nouveau traverser quotidiennement la frontière. La nouvelle, annoncée ce mercredi 25 mars entre autres par le journal « Oberösterreichische Nachrichten », fait suite à la fermeture quasi totale de la frontière tchèque il y a deux semaines. Et constitue un pas dans la direction d’une plus grande solidarité entre pays de l’Union à un moment où le « chaque pays pour soi » est une option qui tente les politicien-ne-s au pouvoir.
La fermeture de la frontière tchèque, appliquée à l’origine également aux frontalier-ère-s, avait renforcé la fâcheuse impression que ce sont les pays de l’Est qui succomberaient les premiers au réflexe d’égoïsme national. La réalité est plus compliquée. Ainsi l’Allemagne, en fermant ses frontières (tout en laissant passer les frontalier-ère-s), avait exclu de son marché du travail les saisonnier-ère-s dans l’agriculture – alors qu’il s’agit d’une source de revenus importante pour de nombreuses personnes en Pologne et en Roumanie.
Les saisonnier-ère-s polonais-es et roumain-e-s sauvent les asperges allemandes
Le 25 mars également, face aux cris d’alarme des entreprises agricoles, Berlin a décidé d’assouplir les régulations en vue notamment de la récolte imminente des asperges et des fraises. Le site Euractiv.de évoque même la possibilité que le gouvernement organise des vols charter allant chercher des saisonnier-ère-s en Roumanie, puisque le passage par la Hongrie est actuellement bloqué.
Ce serait effectivement un grand gâchis que de ne pas parvenir à rentrer les récoltes, alors qu’il s’agit d’une des rares activités économiques à l’air libre, comportant un risque de contagion réduit. Berlin envisage également de récruter la main d’œuvre agricole au sein de la population résidente, et vise les personnes au chômage ainsi que les réfugié-e-s. Un sujet qui concerne également le Luxembourg, spécialement les vendanges qui font appel à des saisonnier-ère-s d’Europe de l’Est.
Les frontalier-ère-s français-es sauvent les patient-e-s suisses et luxembourgeois-es
Mais le souci de voir les raisins moisir sur les ceps faute de saisonnier-ère-s pâlit devant celui de voir mourir les patient-e-s dans leurs lits faute de personnel médical. Un souci que le Luxembourg partage avec notamment la Suisse. Et comme le grand-duché, la Eidgenossenschaft n’a pas hésité à accueillir des patient-e-s Covid-19 français-e-s dans ses hôpitaux.
Cette décision, explique la société de radiotélévision de service public SRF, représente « plus qu’un geste d’entraide d’urgence entre voisins ». « Il s’agit de ne pas se brouiller avec la France », puisque Paris peut à tout moment décider de réquisitionner l’ensemble du personnel médical résidant et l’affecter aux hôpitaux français. Ce qui priverait l’hôpital universitaire de Genève des deux tiers de son personnel – il s’agit de la clinique la plus dépendante de main d’œuvre étrangère.
Comme le Luxembourg, la Suisse a mis des chambres hôtelières à disposition des frontalier-ère-s. Certains cantons sont même allés jusqu’à leur réserver une voie pour un passage de la frontière plus rapide, voire des postes frontière dédiés. Un traitement de faveur donc, alors qu’en temps normal, du moins au Luxembourg, on a plutôt tendance à considérer que les problèmes des frontalier-ère-s sont du seul ressort des pays voisins.