Climat et coalition (2) : la peur de faire mal

Suite de l’analyse de l’accord de coalition de Gambia 2 dans les domaines du climat et de l’énergie. Deuxième partie : les éléments critiquables et la conclusion.

Ménage à trois ? (Pixabay)

Après avoir fait le tour des propositions les plus prometteuses, voici quelques passages de l’accord de coalition plus mitigés. Ainsi, dans le cadre du développement durable, le gouvernement se réfère à l’étude en cours sur « les effets des subventions nocives pour l’environnement », suite à laquelle on renforcerait la cohérence entre politique financière et environnementale (p. 168). Une bonne chose, mais l’étude épargnera probablement les dérivés du pétrole et les subventions indirectes que constituent les taux d’imposition particulièrement bas au Luxembourg.

Ce tourisme à la pompe, qui a déjà fait l’objet d’une étude, est abordé sous le titre « Une approche claire dans le domaine de la vente de carburants » (p. 173). Le gouvernement évoque le « renforcement des mesures à court terme » et des « mesures [prises] de façon continue », mais laisse la nature de ces mesures dans le flou. On notera tout de même que le terme de « sortie virtuelle » (c’est-à-dire sans augmentation des prix à la pompe), présent dans l’accord de 2013, a disparu – c’est plutôt bon signe.

Contournements et coopération énergétique

D’autres propositions laissent également une impression mitigée. Ainsi, le gouvernement annonce une analyse sur la fiscalité de l’énergie, mais en insistant sur les implications budgétaires, les impacts sur la compétitivité et les risques de pauvreté énergétique d’une telle fiscalité, il semble déjà s’excuser de manquer de conséquence en la matière (p. 193). La liste des « grands projets de transport » (p. 237) ne plaira pas non plus à tout le monde. Les projets de construction de contournements et routes de délestage sont nombreux, et certains, comme à Dippach, passent dans une catégorie plus prioritaire. On se consolera avec les trois lignes de tram reclassées en priorité 2 (début des travaux avant 2030), ainsi que la piste cyclable entre Dippach et Bascharage, reclassée en priorité 1 (début des travaux avant 2020).

De même, l’annonce d’une « politique de promotion des green data centers » risque d’être critiquée comme une concession à Google plutôt que comme une avancée écologique. Enfin, le gouvernement réaffirme « l’additionnalité du financement climatique international par rapport à l’aide publique au développement » (p.172), mais ne renie pas – comme le demandent également les ONG – le principe des « indulgences » (« Freikaufen »). Dans le domaine des énergies renouvelables, il assure au contraire vouloir être un « précurseur de la coopération européenne » (p. 189) – ce type de coopération avec la Lituanie et l’Estonie avait donné lieu à de vives critiques (woxx : « Indulgence renouvelable »).

Un objectif CO2 pour 2030 insuffisant

Un point particulièrement gênant de l’accord de coalition concerne l’attitude par rapport aux objectifs européens en matière de CO2. Certes, au sein de l’Union, « le Luxembourg s’engagera en faveur d’objectifs ambitieux » (p. 170). Mais le gouvernement évoque surtout les objectifs pour 2050, alors que ceux pour 2030 sont jugés insuffisants par les expert-e-s et les ONG. Pire, l’accord de coalition grave dans le marbre son propre objectif de 40 % en 2030 (p. 185). Or le mécanisme de révision de l’accord de Paris prévoit un ajustement des objectifs d’ici 2020 – ce sera bien ce gouvernement-ci qui devra décider si oui ou non, il veut apporter sa juste contribution à la lutte contre le changement climatique. De surcroît, le « plan national en matière d’énergie et de climat », en cours d’élaboration, devra aussi « garantir, et même renforcer dans le futur, la compétitivité des entreprises en général et de l’industrie en particulier ».

Mesuré à l’aune de la grande transition écologique nécessaire, ce programme gouvernemental représente plutôt un ensemble de petits pas dans la bonne direction qu’un grand bond en avant. Est-ce la faute d’un parti vert qui, malgré un succès électoral relatif, reste le numéro trois du gouvernement ? Ou faut-il plutôt reprocher aux deux autres partis de ne pas assez se soucier des défis écologiques qui, en fin de compte, conditionnent aussi bien les avancées en matière de justice sociale que la réussite économique et l’épanouissement individuel ?


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