Déi Lénk : (Sur)vive la gauche !

Après dix ans de stagnation, le petit parti de gauche, ni vaincu ni vainqueur, devra s’adapter à une nouvelle géographie politique et pourra, qui sait, se réinventer.

« Écoute la voix, t’as rien à perdre » (Lauschter d’Stëmm, du hues näischt ze verléieren). En fin d’après-midi, les résultats partiels tombent : les verts perdent massivement, l’ADR gagne, les deux sièges Déi Lénk sont incertains. À l’intérieur, ils et elles chantent à tue-tête l’hymne de Déi Lénk, composé par Serge Tonnar, pour se réconforter. « Les gens ont senti la dynamique », déclame Gary Diderich, tête de liste dans le Sud. Évoquant le risque que le parti ne soit plus représenté au parlement, il parle d’espoir, d’engagement, de « la voix », encore de l’espoir… « et sinon, au moins on portera cette voix dans la société civile ».

Dehors, sur le trottoir devant le Chiche à Limpertsberg, verre à la main, c’est moins chantant : « Partout, la droite gagne, au Luxembourg comme en Allemagne », « cela nous obligera à nous réinventer »… Quand le siège dans le Sud commence à se confirmer, Marc Baum, son occupant probable, s’inquiète de la perspective d’être seul au parlement, alors que déjà avec deux député-es, c’était difficile de couvrir l’ensemble des sujets et de faire un travail parlementaire correct. Or, justement, une partie des militant-es estime que Déi Lénk ne doivent plus se laisser aspirer par la démocratie représentative, qu’ils doivent mettre l’accent sur les mobilisations extraparlementaires… Au bout de ce dimanche électoral, le parti qui n’avait « rien à perdre, tout à gagner », aura conservé ses deux sièges. Il est probable que les états d’âme et les idées créatives seront bien vite oubliés face aux exigences du travail parlementaire – Déi Lénk stagnent, tant du côté électoral que du côté de la stratégie politique.

Pourtant la configuration politique va changer : au lieu de batailler avec deux sièges contre trois partis de gouvernement de centre gauche, comme ils l’ont fait depuis 2013, ils seront très probablement face à deux partis de droite. Et ils ne seront pas seuls sur les bancs de l’opposition de gauche : à leurs côtés, les socialistes renforcés, les pirates déçus (si on les considère comme de gauche), les verts qui se sont fait étriller. Ces derniers, on ne les aimait vraiment pas chez Déi Lénk, leur reprochant de représenter les élites urbaines écolos face aux populations délaissées, les considérant comme traîtres aux valeurs de gauche, devenus libéraux et militaristes. Pourtant, par rapport à la débâcle verte de dimanche soir, chez Déi Lénk, c’est la consternation qui domine : conscient-es de l’importance des enjeux climatiques, les militant-es (souvent plus radicaux-cales que les verts) se demandent comment faire avancer ces idées.

Cela annonce-t-il une future collaboration ? Des pourparlers ont été entamés entre Lénk et Gréng pour former un « groupe technique » et dépasser la barre des cinq député-es. Mais il s’avère que les avantages pécuniaires d’une telle construction seraient contrebalancés par des pertes en termes de temps de parole. Au-delà, la question des actions conjointes ou au moins d’une coordination entre partis de gauche reste posée : le LSAP dominant boudera-t-il ses voisins de banc, les verts se replieront-ils sur leur « cœur de compétence », Déi Lénk chercheront-ils à se démarquer à coup de positions maximalistes ? La constitution d’un front uni d’opposition de gauche est possible mais pas certaine (voir édito).


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