Google a réponse à tout. Sauf aux questions que soulève l’installation d’un data center à Bissen. Le gouvernement a esquivé les critiques de l’opposition, mais le débat risque de s’envenimer prochainement.
L’aurait-il imaginé, il y a 20 ans, quand il a tourné le dos au monde des ONG pour s’engager dans la politique de parti ? Mercredi dernier, Claude Turmes, ex-cadre du Mouvement écologique devenu ministre, a balayé d’un revers de main les arguments de son ancienne organisation. Lors du débat sur le data center de Google à la Chambre, Turmes s’est retranché derrière les nécessités de la procédure d’autorisation pour dissiper les inquiétudes liées à l’impact environnemental du projet. Quand on est ministre, on doit bien défendre la politique du gouvernement de coalition.
Ce n’est pas le Mouvement même que Turmes affrontait, mais les arguments de celui-ci, repris par le CSV. L’aurait-elle imaginé, il y a six ans, quand elle s’est lancée dans la conquête d’une position de leader du parti conservateur ? Martine Hansen, incarnant habituellement une droite dure et renouant avec l’électorat traditionaliste rural, a mené ses attaques contre le projet Google avec un discours plus vert que vert. Mais quand on est dans l’opposition, on fait feu de tout bois pour ébranler la crédibilité du gouvernement.
Formellement, le gouvernement a sans doute raison : impossible de dire quel sera l’impact du data center – et donc impossible de discuter de son opportunité – tant que Google n’aura pas donné tous les détails dans le cadre d’un dossier « commodo ». Mais d’un point de vue politique, cela laisse un arrière-goût douteux, alors que le gouvernement a appuyé le projet depuis le début – apparemment sans se renseigner sur l’impact sur l’agriculture et la consommation en électricité et en eau. Les arguments du Mouvement écologique contre un data center à Bissen sont assez convaincants, au point que le woxx avait proposé de réduire l’étendue du Findel et de mettre Google à la place.
Cauchemars et rêves
Le data center risque de causer bien des déboires encore à la coalition. En effet, les ministres de Déi Gréng, qui mercredi ont serré les rangs autour d’Étienne Schneider, principal promoteur du data center, pourraient changer d’attitude une fois les détails du projet révélés. Carole Dieschbourg pourrait ainsi refuser son autorisation de ministre de l’Environnement au cas où Google proposerait des solutions peu satisfaisantes d’un point de vue écologique – un affront pour Schneider et un risque de crise gouvernementale.
Mais le véritable cauchemar serait que Déi Gréng échouent à bloquer un dossier qui se serait clairement révélé contraire à tous les principes du développement durable. Un rapport de forces défavorable suffirait, ou même une exploitation habile des règles de la procédure par Google – une des raisons pour lesquelles le Mouvement a estimé qu’il ne suffisait pas de suivre « la procédure normale ».
On comprend mieux que, mercredi, les ministres vert-e-s s’en sont tenu-e-s à l’hypothèse que Google aurait recours aux meilleures solutions disponibles afin de minimiser l’impact environnemental. Rêvons : le Mouvement et le CSV continueront de râler, mais l’honneur de Déi Gréng et du LSAP sera sauf, et surtout, le projet Google aura un impact positif sur l’économie digitale luxembourgeoise.